samedi 30 octobre 2010

10 1/2 : Film coup de poing et entretien avec Podz


L’inconfort de la différence

Après ses succès à la télé avec Les BougonMinuit, le soir et Au nom de la loi, le réalisateur Podz présente cette semaine 10 1/2, un second long métrage coup de poing qui ne laissera aucun spectateur indifférent.

Claude André

S’il nous avait habitué à des images léchées et cinématographiques avec Minuit le soir, Daniel Grou (Podz) propose cette fois une œuvre qui, pour comparer, incarne l’opposé d’un film comme Les Amours imaginaires de Xavier Dolan.

Avec une caméra proche d’un certain cinéma-vérité seventies et des plans jamais esthétique, le réalisateur braque sa caméra au service de l’émotion brute. Lui qui avait sous la main un acteur prodigieux, le jeune Robert Naylor.

Le film s’ouvre sur une fellation à la télé. Le jeune Tommy qui observe la scène tentera de vivre l’expérience en obligeant un plus petit à lui administrer la chose. Cette scène donnera le ton à un huis clos dérangeant et percutant qui nous transporte dans la vie d’un an enfant d’alcolos/toxicos qui ne connaît que la violence et la colère exacerbée comme seuls moyens de survie.

Heureusement pour lui, il croisera un éducateur bienveillant et patient qui tentera de le comprendre (Claude Legault, juste et empathique) et de le sauver alors qu’il se retrouve dans un Centre de jeunesse (l’ancien Centre de Boscoville).  Y parviendra-t-il ?

Écrit par Claude Lalonde (Les 3 P’tits Cochons) qui a déjà travaillé avec des jeunes aux prises avec ce genre de problèmes, ce film sans musique mais non sans quelques longueurs nous balance un direct salvateur qui nous donne envie de serrer très fort nos enfants contre nous, là, juste à côté du cœur. *** 1/2




-Entretien avec Podz
Humaniste mais pas sentimental

Entre deux passages à la radio, le réalisateur Daniel Grou alias Podz qui arbore une timidité sympathique chaussée Converse, nous a causé de 10 ½, son dernier film, à la cafétéria de la Société d’État.

Serait-ce juste d’affirmer que ce film s’inscrit dans un courant seventies où le cinéma québécois était plus social et engagé ?
Oui, peut-être. Si tu penses à Gilles Groulx et ce genre de trip-là. Mais ce n’était pas vraiment mon but qui était plutôt de filmer la relation entre les deux protagonistes que sont l’éducateur et l’enfant. Mais il est vrai que ça sort un peu comme ça.

Après Les 7 jours du talion, voici un second long-métrage qui bien que de façon différente, s’avère aussi très violent. Doit-on y voir quelque chose comme une signature cinématographique ?
Il ne s’agit pas de violence gratuite mais je comprends ce que tu veux dire. Je ne pense pas que soit une chose que je recherche nécessairement. D’ailleurs, il y aura moins de cela dans mes prochains films. En fait, il s’agit plutôt de représenter des gens qui vivent des choses extrêmes. Je pense que je suis très humaniste dans mon approche mais pas sentimental.

Un peu à la manière d’Albert Camus alors ?
Oui, peut-être. En cinéma ça serait des gens comme gens comme Ken Loach, Gus Van Sant…

Parle-nous du très doué Robert Naylor qui tient en grande partie le film sur ses jeunes épaules. Tu le connaissais ?
Non, il est venu en audition parmi 25 enfants. Tous des comédiens. On a fait une première audition avec lui et on a tout de suite vu qu’il se passait quelque chose. Alors on en a fait une seconde en présence de Claude (Legault) et ce dernier a improvisé en lançant des balles de plus en plus difficiles. Le kid résistait et demeurait avec Claude dans la scène sans jamais décrocher, on a alors su que c’était lui !

J’ai lu quelque part que Claude Legault a été vieilli pour ce rôle alors qu’il a dans la vie cinq ans de plus que son personnage qui lui affiche 42 ans au compteur
Il a été vieilli dans le sens où on voulait qu’il ait l’air plus fatigué. Il fallait que transparaisse l’idée qu’il trouve son travail très difficile et qu’il n’est plus certain d’avoir la force de continuer. Un peu comme cela nous est apparu après les visites que nous avons effectuées dans ce milieu. Mais je ne voulais absolument pas le filmer à la maison ou présenter sa femme. Ce qui aurait été sentimental justement. 

Aucun commentaire: