vendredi 16 mars 2012

Vander : French toasts et peines perdues

Photo: Vander par Yves Provencher pour le Journal Métro.
Partir du réel pour pouvoir y revenir

Après des années de douleurs à la suite de la disparition tragique de Dédé Fortin, avec qui il créa l’album culte Dehors novembre, l’ancien bassiste des Colocs, André Vander, décida un jour de changer sa façon d’appréhender la vie. Résultat? French toast et peines perdues. Comme le dit Leonard Cohen, « il suffit parfois d’une fissure pour laisser pénétrer la lumière »…


Sur ton album, on retrouve des ambiances de bar, des sonorités tomwaitiennes, des élans à la Brel, de la bédé musicale et beaucoup d’autres choses. Quel était ton leitmotiv au moment du processus créatif?
Après mes années de dub et de reggae, je cherchais dans quel type de projet m’embarquer. Or, l’idée de faire un album de chansons est apparue lorsque j’ai repris la pièce Marie-Jeanne (Joe Dassin), qui parle de post suicide mais sans colère. J’ai remarqué qu’il y avait de la colère dans tous les textes que j’écrivais depuis six ou sept ans. Ce qui m’était très néfaste. Donc, à l’origine, je souhaitais composer un album où il n’y aurait pas de colère, histoire de retrouver une certaine paix intérieure.

Peut-on dire que le socle musical de l’album est constitué de reggae Dancehall, auquel on aurait greffé diverses influences arabes, jazz, slaves…?
Cet exercice de style avait pour objectif de m’éloigner du reggae pur. J’ai beaucoup donné là-dedans et je pense que pendant ce temps, j’ai négligé mon côté auteur. À la fin de ce projet, j’ai fait parvenir un cédé au Festival en chanson de Petite-Vallée, et j’ai remporté le prix de la meilleure chanson.

On a parlé des Colocs. Est-ce que l’on retrouve Pat Esposito di Napoli, l’ex-harmoniciste décédé du sida, dans la pièce La Poussière qui raconte, façon bouddhiste comme lui, comment les choses se transforment?
J’ai vécu une longue histoire qui s’est terminée et on a toujours l’impression de perdre quelque chose lorsque cela se produit. Mais « rien ne se perd, rien ne se créer ». Cet amour-là, il va simplement ailleurs. Le côté Pat, on le retrouve dans Le Marginal qui, à l’origine, part d’un couplet que j’avais écrit pour la pièce Tassez-vous de d’là. Comme j’arrivais d’Europe à cette époque, mon écriture était trop française pour le joual à Dédé. Il y a eu un clash. J’ai donc repris cette chanson. Si ça parle des problèmes de dépendance à la drogue? Je préfère conserver un côté mystérieux aux chansons. Car, comme le disait Dédé, « il faut partir du réel pour pouvoir y revenir ».



Parcours musical

1992 : fondation en Belgique du groupe Les Frères Brozeur, avec lequel il officie en qualité de bassiste. Il participe à trois albums.

1996 : installation à Montréal pour se joindre aux Colocs. Son style imprégné de reggae dub procure une saveur particulière à l’album Dehors Novembre (1998).

2001 : avec Mike Sawatzky, ancien membre des Colocs, il coréalise à titre posthume l’album Suite 2116.

2006 : André Dédé Vander se consacre à un projet de remix dub composé de collaborations, qui débouchera sur l’encodé Bass ma Boom Sound System vol. 1.

2007 : création avec Michel Vézina du spectacle « Dub et Litté » et cap sur le Québec, Haïti, la France, la Belgique et le Sénégal.

2010 : le projet « André Dédé Vander » cristallisé par la parution de l’album French toast et peines perdues, en mars 2012.

note : Ce texte est d'abord paru dans le Journal Métro le 13 mars 2012

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