samedi 29 mars 2008

Symfolium




S’il fut une époque où les sorcières attendaient la pleine lune pour mitonner leurs mixtures euphorisantes, les hurluberlus de notre postmodernité et adeptes de la folie salvatrice marquent d’une pierre blanche au calendrier les événements Symfolium. Avec pour thématique la folie et le sacré, le cabaret animé par le kaléidoscopique François Yo Gourd réunira encore un pan important de la scène plus et moins alternative dont Jérôme Minière, Paul Chamberland, Vander, Ève Cournoyer, Les Abdigradationnistes, Kumpania, La Fanfare Pourpour et une vingtaine d’autres… Délire assuré.

Lion D’or
514-598-0709
Mardi 1er Avril
20h00 Cabaret poélitique 20 $
23h00 Bal de la réfolution avec la Fanfare Pourpour, entrée libre.


Billets également dispos à l’Oblique et l’Échange.

Bïa


Bïa
Nocturno
Audiogram/Select

C’est à une nuit suave sous un ciel étoilé que nous convie Bïa avec ce rendez-vous vêtue de soie noire, de folk latin, de poésie et de jazz.. Chaud comme la lune de juillet, Nocturno, réalisé par Erik West-Millette, fleure bon la peau salée des promesses charnelles grâce, surtout, à cette salutaire rencontre avec Charles Papasoff qui y signe des arrangements somptueux de cuivres et de bois en plus de l’accordéon de Francis Covan ou des six-cordes d’Yves Desrosiers, Bernard Falaise et Simon Godin. Avec la complicité de ses amis du Mile-End Lhasa et Thomas Hellman qui viennent faire coucous, la Brésilienne nous permet de croire encore aux promesses de l’aube que ce soit en français, portugais ou espagnol. Grande classe. **** (CA)

À télécharger :
Madalena
Los Hermanos
Mes Zaricots

jeudi 27 mars 2008

Karkwa: planer sur la ville



Pour son troisième chapitre, Karkwa poursuit sur sa lancée pop exploratoire avec une démarche encore plus orchestrale, urbaine et planante.


Claude André

Très attendu, ce troisième opus ne dépaysera pas les amateurs et continuera de faire rayonner la formation auprès de ses pairs dont plusieurs pointures européennes.


Malgré l’engouement pour Les tremblements s’immobilisent, le précédent album, Karkwa a su résister à la tentation commerciale souvent inhérente au succès. Même que les gus se sont demandés, comme à la fin du précédent disque d’ailleurs : «sommes-nous allés trop vers la pop ?», confiera Louis-Jean Cormier.


Mais depuis la publication de la chanson «Échapper au sort», il y a quelques semaines, on présageait déjà une mouture mélodique, certes, mais encore plus étoffée sur le plan des arrangements progressifs-rock qui sont une des caractéristiques fondamentale du groupe. «Plus orchestral ? Je crois que c’est le mot juste. Sans le vouloir vraiment, il est vrai qu’on a poussé cet aspect encore plus loin. Il y a des espèces de buzz minimalistes et d’autres orchestraux comme la finale de «La façade» justement qui lève en crescendo. Puis on a ajouté le vibraphone ainsi que des envolées de voix», analyse Cormier, le chanteur du groupe entouré des autres musiciens qui acquiescent du chef dans ce petit local de répétition craignos et déglingué de la rue d’Iberville. Local grand comme une salle de cours où l’entre eux, François le claviériste, se retirera dans le cadrage de porte à quelques reprise histoire de griller une clope.

Urbanité fumante


Parlant de fumer, Le volume du vent pourrait très raisonnablement s’accommoder des volutes baudelairiennes dispensées par ses éventuels auditeurs, n’est-ce pas Louis-Jean… ? «Oui oui, tout à fait. La plupart des chansons ont été inspirées de et créées par…», rigole le sympathique chanteur et guitariste de la formation.


L’urbanité semble également avoir beaucoup inspirée les textes avec leurs références aux néons, lampadaires et autres ponts sans compter que le premier clip tiré de la chanson «Échapper au sort» (très beaux dessins animés) traite de la descente aux enfers d’un jeune de la rue. Comme si il y avait des velléités conceptuelles derrière le projet. «Je trouve que le milieu urbain est un sujet super inspirant. Moi, je viens de Sept-Îles, ça fait tout de même dix ans que je suis à Montréal, mais je continue à y puiser des nombreuses images. Puis, il y a un thème, celui du stress et de la conciliation travail/amour qui se dessine tout le long du disque», raconte Louis-Jean, principal parolier du disque en plus du poète Pierre Nepveu qui y signe «Le Solstice» dont un extrait a inspiré le titre de l’album.


Avec d’autres invités qui se démarquent tels Élizabeth Powell de Land of talk, Patrick Watson, Olivier Langevin, Marie-Pierre Fournier ainsi que le quatuor Cartier, parions que le dernier trop musical de la formation qui a vu le jour il y a dix ans nous fera planer encore un max. Qu'importe le volume de boucane…


Karkwa
Le volume du vent
Audiogram/Select

vendredi 21 mars 2008

Cali discographié



Clip de la chanson «Elle m'a dit» tirée du premier album C'est quand le bonheur? qui nous avait littéralement subjugué lors de sa parution en 2003. On voit ici Cali en compagnie de Miossec.

Auréolé de ce nouvel opus, L’espoir, au casting plutôt relevé qu’il viendra nous dégoupiller cet été aux Franco, le Perpignanais qui a retrouvé la fougue, l’urgence et l’exaltation de son premier encodé nous fait part de ses coups de cœur dont ceux pour Arcade Fire et The Waterboys. En attendant de voir cette bête de scène nous livrer ses chansons indociles et autres blessures d’amours déglingués…

Claude André

Sur ton dernier album L’Espoir on retrouve quelques chansons disons de gauches. Quel est pour toi la plus belle chanson révolutionnaire ?

«Els Segadors». C’est une chanson de révolte des opprimés catalans interdite par tous les gouvernements et par tous les rois qui se sont succédés en Espagne et en Catalogne. Une chanson remplie d’espoir. Version ? Celle du groupe catalan La Cobla. Sinon, «Le Temps des cerises, ouais. Et, tu as raison, on peut aussi insérer «Où c’est que j’ai mis mon flingue», de Renaud.

Avec ton dernier cd, on retrouve «Pas la guerre», ta plus belle chanson antimilitariste ?

«Le déserteur», de Vian évidemment. Il y a aussi une chanson de Waterboys : «Red Army Blues». Je mettrais aussi l’œuvre complète de Patti Smith et «Le Parachutiste» de Maxime Leforestier.

Tu chantes «Le droit des pères», la plus belle chanson écrite pour un enfant selon toi ?
Il y en a pleins. Celle de Lavilliers, «Petit» est très belle par exemple ou «Isabelle» de Brel. «Prendre un enfant par la main», de Duteil c’est très joli aussi et la superbe «Votre fille a vingt ans», par Reggiani.

Ton dernier disque nous fait craquer et toi, c’est lequel ?
Hum, j’en achète pleins… Banco des Têtes Raides, il y a une top chanson qui s’appelle «Expulsez-moi», dessus et sinon le dernier Dyonisios La mécanique du cœur, le dernier Dominique A, le Brest of (à la correctrice : ce n’est pas une faute) de Miossec et aujourd’hui on a le nouveau Raphaël qui sort.

On retrouve sur L’espoir une chanson intitulé «Les beaux jours approchent», ta plus belle chanson d’été ?
Wow ! (rires). Merde. C’est compliqué. Je vais dire «Hollyday In The Sun» de Sex Pistols (il se met à chanter). Une chanson qui m’a aussi bercé tout l’été, «No Cars Go» d’Arcade Fire.

C’est vrai, ton album fait d’ailleurs parfois penser à ce groupe…

Ben oui, j’ai pris pour quelques chansons le producteur Scott Colburn qui a travaillé sur «Neon Bible» ce n’est pas pour rien. Je les ai vus à Paris, c’était énorme.

Pour faire un parallèle avec ta «Paola», quelle est ta chanson sensuelle préférée ?
«Je t’aime moi non plus», interprétée par Gainsbourg et Bardot, et ensuite avec Birkin.

Ton idole musicale ?
Mike Scott, le chanteur des Waterboys (que l’on retrouve sur «Pas la guerre»).

Ton fantasme musical ?
J’aimerais faire une chanson où je serais au chant avec Mike Scott. Aux cœurs, il y aurait Bono, Patti Smith, Joe Strummer et David Bowie. Au piano à six mains on retrouverait Beethoven, Tom Waits et Nick Cave. Keith Moon (The Who) jouerait de la batterie. Les guitares seraient tenues par Keith Richard et The Edge et Sid Vicious se chargerait de la basse. Puis, devant nous, il y aurait il y aurait une salle de bal où danseraient, seuls, Léo Ferré et Mick Jagger.

Et vous chanteriez...?
Ça pourrait être «Tom Traubert's Blues» de Tom Waits.

Le disque pour t’exiler sur une île avec une femme belle et amoureuse ?

Unforgettable Fire, de U2.

Et le meilleur disque de tous les temps ?

Oulala (rires). Tu es dur là. Alors, c’est compliqué. Pour moi, je dirais, This Is The Sea, des Waterboys ou alors Never Mind de Sex Pistols ou encore le premier Clash (The Clash) ou le War de U2.

Le premier disque que tu as acheté ?
Plutôt le premier que l’on m’a offert, c’était L’eau vive de Guy Béart. J’ai d’ailleurs fait reprise de cette chanson.

Tu as également repris «Je reviens te chercher» de Bécaud…

Ah oui (rires). J’avais fait ça pour le générique d’un film qui s’appelle «Chef d’orchestre».

La chanson la plus ringarde que tu aimes ?
Merde, je croyais que tu avais oublié cette question…«Le Bac G», de Michel Sardou. Ah, non il faut que j’aime bien hein ? Oublie, oublie… Allons-y avec «Les portes du pénitencier» de Johnny Hallyday


La chanson que tu aurais aimé écrire ?

Il y en a pleins…Disons «Thunder Road», de Bruce Springsteen.

samedi 15 mars 2008

Annexe

L'ami Steph ce matin: «Le Café Pico est une succursale non-officielle de Louis-Hyppolite Lafontaine». Hummmm...voila, en effet, ce qui expliquerait bien des choses...

Y'a plus de rockeurs putain d'bordel de merde !

Fine et tordante analyse du rock vu par un expert...(si ce n'est pas un comédien)

jeudi 13 mars 2008

Du bon H


Photo : Arthur H

S'il m'a fait rencontré deux femmes qui m'ont dévoilé leur chef-d'oeuvre, dont une m'a lesté d'une triste musique au fond du coeur récemment, mon boulot m'a également permis de vivre des moments plutôt cools ces derniers temps.

Ce fut le cas lundi dernier lorsque je me suis retrouvé à une séance d'écoute exclusive du prochain encodé de Artur H au Patro Vys, un bar qui crèche avenue du Mont-Royal.

Réalisé tour à tour à Paris et Montréal avec la complicité de Jean Massicotte (Pierre Lapointe), «du commerce équitable quoi», dixit l'Arthur, «L'homme du monde» a littéralement subjugué les 6-7 journalistes présents dont l'auteur de ces lignes et l'ami Pat que je n'avais pas vu depuis qu'il est passé au Voir.

Nous étions là, épars, assis sur les tabourets hauts, oreilles tendues et pieds battant la cadence, à regarder la scène vide (!) tandis que l'artiste, derrière, faisait les cent pas un moment et observait les bouteilles d'alcool dans une remise à l'autre.

Sa jeune conjointe, au bar, marmaille dans les bras, scrutait furtivement les réactions des journaleux en souriant ici et là. Effectivement, n'avait pas à s'inquiéter.

Inspiré par le ciel de Grèce, comme l'a fait si souvent Leonard Cohen, ce sixième disque studio, contrairement aux précédents, a été composé à la guitare plutôt qu'au piano. Ajoutez à cela un Arthur heureux en amour et un autre bébé qui s'en vient et vous comprendrez que l'oeuvre ne porte pas cette tristesse à laquelle nous avait habitué l'artiste.

En fait, c'est vraiment un trip seventies qui nous assaillira de ses élans funky, R& B et disco top groove le 2 juin prochain, date de parution de l'encodé.

Si on retrouve évidemment les influences de Tom Wait, l'Arthur nous gratifie de quelques clin d'oeil à Claude François et son disco kitsch, au délire de «Echoes» de Pink Floyd quand ce n'est pas Ziggy Stardust de Bowie ou à Nick Cave dont la chanson My father is a cosmonaut a inspiré la délirante Cosmonautes père et fils.

«Tu vas envahir les dancefloors et venir nous présenter un show avec paillettes, mega lunettes de soleil et costume blanc stresh disco, toi». «Qui n'en a jamais rêvé», a -t-il répliqué avec justesse avant de me préciser qu'en ce qui concerne sa présence sur scène, ça irait en 2009.

En attendant, c'est la très disco Dancing with Madonna ou le rock de Lady is Back qui feront danser le soleil de 2008. Vous avez hâte?

jeudi 6 mars 2008

Discographie : Alexandre Belliard


Belliard et Renaud à Québec


En plus d’effectuer sa rentrée montréalaise et de lancer son recueil de poésie «Tu cours après les pigeons», l’auteur du très bel hommage au poète mythique Denis Vanier La star du rodéo sillonnera les salles du Québec avant de traverser la grande mare pour participer à des Marché de la poésie. Rendu là, il espère effectuer une tournée de son spectacle «Demain… la peur». Vendredi 7 mars au Lion d’Or à 20h00. Avec 4 musiciens, Monsieur Mono comme invité et Louis-Étienne en vedette américaine.

Claude André


Le premier disque ?
Shot At The Devil, de Mötley Crue. Et le premier que j’ai reçu en était un d’Angèle Arseneault, «Libre». D’ailleurs excellent et que j’écoute encore.

Ton disque préféré à vie ?

Hummm….Étant donné que j’en possède deux milles à la maison, ce n’es pas évident. Si je ne devais en choisir en seule je dirais «Ma gonzesse» de Renaud sur lequel on retrouve ma chanson préféré Salut Manouche en plus de Ma gonzesse et de La tire à Dédé. Mais pour être honnête, ça serait toute la discographie de Renaud. C’est comme s’il s’agissait d’une œuvre entière. J’aime tous ses albums.

Et son dernier, tu l’aimes avec autant de passion ?

C’est vrai que «Rouge sang» est celui que j’ai écouté un peu moins. Mais je trouve ça plate de dire que j’aime moins quelque chose de Renaud, il a tellement de belles affaires. Tous les albums de Renaud m’ont habité d’une façon obsessionnelle.

Le disque qui t’a donné le goût de faire de la chanson ?
Je dirais «L’escalier» de Paul Piché. J’ai commencé à jouer de la guitare avec des chansons de Beau Dommage et de Paul Piché.

Tu portais des chemises à carreaux ?

N….oui, mais en fait j’étais grunge. J’écoutais Paul Piché et Soungarden en même temps.

Album québécois préféré ?
Je dirais «Planter le décor», de Fred Fortin.


Album français préféré hormis Renaud ?

L’album «Les chansons perdues» de Mick est tout seul (Mickaël Furnon). Le chanteur de Mickey 3D.

Album anglophone de prédilection ?

J’aime bien Grant Lee Buffalo.

Plaisir coupable ?
Ben avec Angèle Arseneault, c’est quand même pas pire coupable. Mais c’est des textes écœurants de l’époque de la libération de la femme. Moi, en tout cas, je trouve ça vraiment très fort mais je ne peux pas faire écouter cela à mes amis…Ils ne me trouveraient pas drôle.

Dernier cd acheté ou volé ?

Acheté c’est The Deils et volé c’était la cassette de «Shot At the Devil» en 1984.

La plus belle chanson du monde ?
Je dirais que c’est Mistral gagnant de Renaud.

On ne te demandera pas qui est ton chanteur préféré…mais la chanteuse que tu affectionnes le plus, pas Angèle Arseneault quand même ?
Ouais, je dirais Angèle Arseneault et il y a aussi PJ Harvey.

Ton fantasme musical ?
J’aimerais, à la manière de Brassens ou Félix Leclerc, parvenir à faire une œuvre, pratiquement guitare/voix qui se tient et ne vieillit pas.

Le disque que tu apporterais au fond de l’océan. Donc il ne faudrait pas trop déprimer…?
Une compil de Brassens avec quatre cent tounes.

La chanson le plus drôle que tu connais ?
Je pense que c’est Martiniquaise de Soldat Louis.

La plus triste ?
Que je t’étranglerai, de Fred Fortin. Ah oui, il y a aussi Lomer de Richard Desjardins. Un texte très réussi à la manière de François Villon. C’est magnifique et tellement cinématographique imagine : adieu la terre pourtant si bonne…

Ta toune préféré de toi et pourquoi ?

La star du rodéo. Parce que le sujet, la mélodie… J’aime l’attitude, bref j’aime tout de cette chanson là. Il y a même un extrait de poème de Denis Vanier dedans. C’est ma chanson préféré de moi de tout les temps.


Le plus grand auteur selon toi, Renaud ou Desjardins ?

Pour moi, ça reste Renaud parce ça fait 40 ans et qu’il a 28 albums mais les deux univers sont essentiels. On ne peut pas en bafouer un.

dimanche 2 mars 2008

Patrick Bruel: qui a le gauche?



Histoire de couronner vingt ans de Bruelmania, Maurice Benguigui vient lancer «des souvenirs…ensemble», un encodé et un dvd captés en public de l’été 2006 à octobre 2007. Rencontre.

Claude André

Je l’observe scruter, commenter et maugréer au sujet son horaire serré des prochaines heures à l’endroit de son attachée de presse. «Sans doute pas facile à vivre, le type», me dis-je en ayant en mémoire une discussion avec une relationniste qui l’a «subi» un jour.

Puis, la discussion s’amorce. Malgré quelques bâillements imputables au décalage horaire, l’homme, enfilait-il un nouveau rôle ?, est affable, séduisant, plutôt mec assumé et généreux dans ses réponses. Je comprends petit à petit un peu mieux l’engouement autour de sa personne. Regard vif, on sent qu’il est passé maître dans l’art de jauger son interlocuteur. Champion du monde de poker, c’est ça aussi.

Je lui raconte que j’ai visionné la veille un document dans lequel il expliquait que c’est un concert de l’illustre Serge Reggiani qui l’a amené à la chanson. Or, lui, Bruel, est devenu l’idole des minettes qui s’agglutinent par dizaines de milliers à son passage. Si l’auteur de ces lignes à pu s’identifier à la colère de «Casser la voix» il y a vingt ans, nenni par la suite. Y aurait-il eu un malentendu entre Bruel l’auteur de chansons et le public qui l’a choisi ?

Le malentendu

«Celui qui m’a vraiment donné envi de chanter, ça dû être Brel quand j’avais 4-5 ou 6 ans. Ma mère avait acheté un disque et ça me touchait beaucoup. Ensuite, un jour, par hasard, on a croisé un ami de ma mère qui allait voir Reggiani à Bobino. On est allé avec lui et le lendemain, j’ai demandé le disque et je chantais ses chansons devant la glace. Ce sont toujours des chanteurs qui m’ont donné envie de faire ce métier. Probablement à cause d’un phénomène d’identification. Soit le chanteur me racontait une partie de mon histoire, soit je rêvais de devenir le chanteur», explique Bruel avant de convenir qu’il y a effectivement eu un malentendu sur la perception que le public pouvait avoir de lui. Les gens auraient choisi de mettre l’emphase sur les jeunes filles exubérantes alors qu’il n’y avait pas que cela dans les salles. Et, soutient-il, ces jeunes filles qui étudiaient ses textes au lycée aimaient également Brel, Reggiani, Brassens et même Ferré. «Cela n’était pas incompatible. Mais il est vrai qu’on a mis un peu de temps à m’accepter, à me faire rentrer dans la famille des auteurs-compositeurs-interprètes respectés. Il y a eu une espèce de condescendance en regard de mon succès auprès des jeunes filles mais cela s’est équilibré. Le respect est un long combat, surtout lorsque tu as beaucoup de succès.»

Le respect du public plus «sérieux» était donc programmé dans les astres. Il est surtout venu avec la publication de l’excellent Entre-deux en 2002 (on n’en retrouve hélas qu’une chanson sur le récent dvd). Un disque de classiques puisés dans le répertoire français de l’entre-deux guerres qui, coquin de sort, allait faire un pied de nez aux lepénistes de tout acabit. Eux qui, malgré leur succès au premier tour des élections présidentielles de cette année-là, devaient se farcir ce Benguigui qui s’emparait des chansons fétiches de la grande France. «C’est vrai que l’album est sorti dans des circonstances particulières avec Le temps des cerises chanté par Jean-Jacques Goldman et moi a capella». C’était lourd de sens n’est-ce pas que cette reprise tiré du répertoire des classiques de la gauche ? «Oui. Surtout chanté par deux Juifs ».

Patrick Bruel
Des souvenirs ensemble…
Musicor/Select

Cd et dvd.