mercredi 25 février 2009

Montréal en lumière

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Crédit photo: Jean-François Leblanc


Angele Dubeau et la Pietà
Entourée de l’ensemble féminin de cordes nommé la Pietà qu’elle a crée en 1997, la virtuose Angèle Dubeau et l’excellent récitant qu’est Albert Millaire feront revivre le texte narratif le plus célèbre de la Renaissance, Les inestimables chroniques du bon Gargantua écrites par ce truculent jouisseur qu’était François Rabelais et mises en musique par Jean Françaix. Dubeau, Millaire et la Pietà, «c’est plus que du bonbon» c’est le pied… (CA)
Mardi 24 février 09
Théâtre Maisonneuve


Piaf, une vie en noir et rose.
Avec l’intensité d’un fusil qu’elle aurait eu fusil braqué sur le cœur, Piaf est entrée dans la légende des âmes exaltées. Cette biographie musicale théâtrale lui rend un vibrant hommage. Avec Nathalie Lhermitte, Aurélien Noël et Jacques Pessis au Gesu les 26-27-28 et 29 février


Paris pour moi
Pour clore la dixième édition du Festival Montréal en lumières, on a décidé de créer une grande fête consacrée à celle que l’on nomme depuis toujours la Ville lumière : Paris. Et pour l’occase, c’est cette grande amante de la chanson française qu’est Monique Giroux qui assurera la mise en scène de cette soirée lumineuse où brilleront les Agnès Bihl, Betty Bonifassi, Michel Fugain, Thomas Hellman, Nathalie Lhermitte, Catherine Major et autres artistes. (CA)

Place des Arts
28 février
20h00


Crédit phot: Victor Diaz

Antoine Gratton


Antoine Gratton
Le problème avec Antoine
Sphère/Dep

Enveloppé d’un nuage de chaleur imputable notamment à ce fameux piano droit qu’il a déniché, Antoine Gratton et son alter ego Eloi Painchaud nous ont mitonné un album qui nous plonge directement dans les années 70 avec ses couleurs funk et R&B. D’un côté des chansons accrocheuses, touchantes, et superbement arrangées, entrecoupées de petits rideaux musicaux où le jeune homme met à nu son côté sombre. Et, de l’autre, une«face b» sur laquelle on retrouve mega trip instrumental de 30 minutes tiré de jams auxquels on se sent partie prenante. En primes : des cartons illustrés style bédé pour les paroles. C’est que l’Antoine est désormais un super héros. Et, c’est bien connu, ça fesse fort ces gens là. **** (CA)

Agès Bihl


Agnès Bihl
Demandez le programme
GSI/Select

Un sourire grand comme le bar du Ritz, voilà ce qui s’installe lorsque l’on capture les premières mesures du nouveau tour de passe-passe de cette neuilléenne ultra douée qui a grandi au rythme des chansons à textes et se qualifie elle-même de «Renaud au féminin». Cela dit, comme son mentor, elle peut également devenir tragique lorsqu’elle cause, par exemple, de l’inceste. Autre référence évocatrice, on dit qu’elle aurait découvert sa vocation dans un cabaret libertaire en écoutant le surdoué Alain Leprest. Bien sûr, comme pour la plupart de ses compatriotes de France, nous n’écouterons pas ce récipiendaire du prix Félix-Leclerc (2006) pour la puissance de sa glotte qu’elle semble avoir haut perchée mais bien pour les mots d’esprit qui virevoltent de sa plume à la fois hyperréaliste, caustique, ironique et résistante. Coup de cœur pour cette digne représentante de la chanson française actuelle qui devrait, avec ce troisième album, s’imposer très bientôt parmi les valeurs sures. *** ½ (CA) Au Studio-Théâtre de la Place des Arts les 24 et 25 février.

I’m a poor lonesome callgirl
Demandez le Programme

Serge Lama


Serge Lama

L’âge d’horizons

Warner

Pas loin d’Aznavour mais avec davantage d’audace, Serge Lama occupe une place prépondérante dans le gotha des paroliers français. Au soir de sa vie, il le prouve a nouveau avec ce magnifique album de variété. Touchant avec son hommage aux «filles d’Abraham», Lama balance ici et là des fulgurances genre «j’arrive à l’heure où pour sembler moins moche il faut être élégant». Mot juste et précis, l’artiste, fidèle à son habitude, n’évite pas certains écueils de la variétoche genre duos sirupeux. Mais cela compte peu lorsque l’on considère qu’il va jusqu’à oser incarner Bertrand Cantat qui raconterait le soir de la catastrophe ou se glisser dans la peau d’un Socrate philosophant ses «complicités pubères». ***1/2 (CA)

Les filles d’Abraham

D’où qu’on parte

Comboys fringants


Les professionnels broche à foin

En marge des l’industrie clinquante, les Fringants publient un douzième album, réinvestissent le National pour 6 soirs et continuent de rayonner dans l’inconscient collectif.

Claude André

Ils se pointent dans le loft industriel. Par réflexe, on cherche du regard Dom Lebeau, le plus cabotin de la bande, qui n’y est plus. Le photographe et le journaliste se sentent un peu nerveux car prévenus : «les Cowboys détestent se faire prendre en photo, faudrait que ce ne soit pas trop long».

J’observe Jean-François, l’ultra doué parolier-compositeur crâner plus ou moins à l’aise dans le fauteuil de la maquilleuse en me disant qu’il en a coulé de l’eau sous les ponts.

Flash : c’était il y a une douzaine d’années. La collègue Sophie Durocher m’avait demandé quel était mon plus récent coup de cœur à son émission sur Télé-Québec. J’avais eu le privilège de parler de la démo de cette bande de Repentigny intitulée Sur mon canapé. Totalement broche à foin mais si vivifiant. On reconnaissait déjà l’influence de Renaud dans l’approche et le choix des thématiques mais adaptée à la sauce typiquement québécoise L’animatrice les a réinvités à 5 ou 6 reprises. Puis, vogue la galère. Au fil des douze albums publiés depuis, ils ont vu toute une génération s’identifier à eux et à leurs chansons qui disaient tout haut ce que ressentait cette jeunesse gauchisante mais silencieuse. Et, ce n’est pas fini, voilà que la France, la Belgique et la Suisse leurs font des guili-guili. Et pourtant, comme immunisés, ils ne se la jouent toujours pas grosse tête, contrairement à d’autres…Ils évoquent d’ailleurs dans la chanson «Chanteur pop» (sur Un air de déjà vu) les avatars d’un personnage nommé Daniel (lire Booom) Desjardins auquel, entre un papier signé Petrowski et un passage à Guy A. Lepage, le succès aurait hypertrophié l’ego.

Un lien à établir avec les membres de cette formation dont les membres refusent généralement toutes les invitations télés et évitent le culte de la personnalité ?

Demeurer humbles

«Le groupe a été créé pour faire rire les amis et s’amuser nous même en jouant les week-ends. Alors, on a conservé cette idée qu’il faut toujours avoir du plaisir. Il y a toujours une grande part d’improvisation à chaque concert et on s’arrange pour garder une synergie, une proximité avec le public. C’est un peu pour ça qu’il y a toujours une part aléatoire de 7-8 chansons que l’on choisi d’interpréter qu’une heure avant chacun des concerts. Cela nous permet de garder une certaine fraicheur lorsque l’on est sur scène et, d’un autre côté, en étant pas jet set, présents tous les médias et en n’apparaissant pas dans les journaux à potins, nous évitons de nous brûler et de nous surexposer. Cela fait en sorte qu’il ne se créer pas de distance avec le public. Lorsque nous rencontrons des gens sur la rue, c’est toujours simple comme si nous pouvions prendre une bière ensemble alors que la télé pourrait créer une distanciation», analyse Jérôme, le pertinent doctorant de la formation.

Puis J-F ajoute : «il y a plusieurs autres raisons»… Karl se joint à la discussion et Marie-Annick la quitte pour se faire maquiller. C’est ainsi chez les Fringuant : pas de porte-parole officiel. Pas de leader qui imposerait sa vision des choses, bref le règne de la collégialité où tout le monde peut s’exprimer à tour de rôle au nom de groupe. «Tu demandais pourquoi nous avons encore autant de fun à être ensemble tantôt. C’est parce que le groupe est une entreprise de consensus. On se demande toujours de quelle façon on doit procéder pour que tout le monde soit heureux. Ainsi, on organise nos tournées et on trouve des façons de faire des albums qui conviennent à absolument chacun. Ainsi, aller en France genre 4 fois par année pour une dizaine de jours, ça convient à tous alors on y va», reprend Jérôme. Et ils y retourneront d’ailleurs en avril pour quelques dates en plus de la Belgique avant de revenir poursuivre l’actuelle tournée qui pendant deux ans les mènera aux 4 coins du Québec. Tournée au cours de laquelle les fans pourront entendre une dizaine de chansons de l’album L’Expédition et une quinzaine de pièces des autres encodés tout en étant assuré d’y retrouver un noyau indélogeable composé notamment de «En berne», «Les Étoiles filantes», «La reine» et «Ti-Cul». «On ne peut pas faire toutes nos ballades car on veut que notre show demeure festif», analyse Marie-Annick en précisant que le peacing dépend également, tel un band de bar, des demandes du publics. Toujours cette proximité donc… Puis Jérôme ajoute : «Tu sais on est devenu des professionnels, mais des professionnels broche à foin.»





Sur un air de déjà vu
Destiné d’abord aux fans qui pouvaient en télécharger les pièces sur I tunes, l’album Sur un air de déjà vu, en raison de la demande très forte, se retrouve dans les bacs depuis mardi dernier (le 17 fév.) On y retrouve des chansons en goguettes qui ne cadraient pas avec le concept de «L’Expédition» paru à l’automne. Parmi les 16 titres, une pièce qui imite l’accent acadien, une autre su le beau-frère fendant, une sur le club de hockey Canadien, et une notamment, sur un chanteur pop qui serait un certain Daniel Desjardins (Boom)…. Bref, le côté plus festif prend ici toute la place. Et comme ils ont l’habitude de proposer des spectacles qui sortent de leur cadre habituel, on pense à celui consacré aux «insuccès», les CF prévoient présenter une série de concerts élaborés autour des chansons de Sur un air… Honnêtement, l’auteur de ces lignes le préfère à «L’Expédition».

samedi 14 février 2009

Grattons le bobo



Avec Le problème avec Antoine, le porteur d’étoile se paie un méchant trip soul-funk-honky-tonk qui fleure bon les seventies. Thérapie ?

Claude André

Très attendu de la petite communauté des observateurs de la scène musicale, le troisième album de celui qui avait reçu un accueil chaleureux avec Montréal Motel et Il était une fois dans l’est, continue de creuser le sillon des glorieuses années Motown mais cède moins à la tentation rock chevelu.

Avec cet album double qui comporte des chansons inspirées des lendemains de biture et d’une certaine remise en question et, d’autre part, un «côté B» qui révèle un méga trip instrumental tiré de jams enregistrés lives, Gratton se paie la totale.
Non satisfait d’y avoir convoqué un bouquet de fines fleurs cueilli dans le champ gauche de la pop québécoise : Jorane, Mara, Ginette et Marie-Pierre Fournier, l’Antoine propose un album orné de cartons sur lesquels on retrouve l’ensemble des textes magnifiquement illustrés façon bédé.

Si le «concept» annoncé d’un album inspiré des 5 sens semble un peu tiré par les cheveux, on y retrouve néanmoins une cohérence musicale très intéressante et on s’étonne de découvrir un Gratton meurtri qui des la seconde pièce nous balance sont mal de vivre avec «Malàlavie». Une pièce dont le propos plutôt glauque n’est pas sans évoqué la mémoire de Dédé Fortin dont on par le beaucoup ces temps-ci en raison de l’imminente parution du film qui lui est consacré. «C’est drôle que tu parles de ça car c’est moi qui danse de la claquette dans le film», lance le souriant jeune homme devant son copieux petit déj commandé juste en face du bar Le Verre Bouteille dont il a souvent tracé les reliefs de nuits mémorables.

La dualité


Parlant de nuit. Ce «Je» qui semble entremêlé entre les lignes de sa vie rock éthylique, est-ce un personnage ou c’est Antoine Gratton ? «C’est ça la dualité de cet album, tsé. Les chansons sont écrites dans l’optique que c’est de moi dont il s’agit, de mes émotions, de mes sentiments, mais tout l’enrobage autour est pensé en fonction d’un personnage. Je suis encore à moitié chemin entre les deux mais j’adore l’idée de la bédé. Des chansons comme «Malàlavie» cependant, ça vient drette du cœur. Il ne m’arrive pas souvent de ressentir le besoin de sortir quelque chose comme ça mais là c’était le cas. Il y a des périodes d’excès dans la vie et il faut traverser la ligne pour redevenir égal. Je pense que si c’est normal ce n’est pas plaisant en mautadit. Cet album est le résultat de cette période là. Derrière moi ? On a sort pas, il y a toujours des tentations…Mais ce qui est le fun c’est qu’il y a eu du monde autour de moé pour me dire : fais attention, t’es un osti d’bon gars. Pis ils m’ont sacré 3-4 claques dans la face de sorte que ce n’est pas allé trop loin», explique le charmant artiste sans fausse pudeur qui englouti son omelette en parlant peut-être de son complice Eloi Painchaud. Le petit ami de Jorane qui a encore une fois participer de façon significative à ce chapitre funky et organique dont le son particulier du piano honky-tonk distille une impression agréable de chaleur. «On a fait l’album dans une grange dans le Nord et j’ai habité là pendant 2 mois, straight, grosse barbe bref Stallone dans Rocky 4. Éloi venait à tous les jours. Comme je cherchais un piano droit, je suis allé à mon ancienne école secondaire là où j’ai commencé à tripper musique. J’entre dans une salle où se trouvaient une vingtaine de pianos puis je tombe sur celui-là qui sonne à l’infini comme le dernier accord de Sgt Pepper’s. Je commence à jouer et je me dis : wow, wow, wow. Je rabaisse le couvercle et je vois graver : Antoine. C’est moi qui y avait laissé ma marque dessus il y a une quinzaine d’années et j’avais complètement oublié», sourit le veinard.

Le journaliste regarde les vêtements seventies au fond du café-friperie. Tiens, voilà un véritable scénario de film hippie. Comme la musique de cet opus qui devrait plaire aux amis de plus en plus nombreux de l’Antoine.

Le problème avec Antoine
Dans les bacs dès le 17 février
Sphère/Dep
En spectacle formule trio à La Place à Côté
Les dimanches 22 mars, 19 avril, 17 mai et 21 juin.

Lost Song : La tension permanente, commentaire et entrevue


Dans un film où il ne semble paradoxalement rien se passer, une tension permanente nous emporte jusqu’à la toute fin.

Claude André

Un couple trentenaire bobo décide de s’installer pour l’été dans un chalet au bord d’un quasi isolé lac des Laurentides avec leur nouveau-né tout près du camp de la bienveillante mère (efficace Ginette Morin) de Monsieur. Lui, le fils-à-maman (inquiétant Patrick Goyette) veston-cravate part tous les jours bosser à la ville tandis que Madame, une chanteuse d’opéra (Suzie LeBlanc), tente de répéter en vue d’un récital à l’automne. Une ado en vacances (Marilou Longpré Pilon) viendra à l’occase tromper l’ennui de Madame qui, entre deux cigouilles, semble psychologiquement déboussolée par sa maternité récente.

Dans un cadre bucolique où Mozart se marie à la grandiloquence de la nature, le réputé cinéaste cadien Rodigue Jean livre une autre belle leçon de cinéma.

Si les amateurs des seuls films popcorns n’y trouveront pas leur compte, les cinéphiles qui ont aimé le récent Home d’Ursula Meir ne voudront surtout pas louper ce long métrage dans lequel s’installe petit à petit une violence muette et subtilement suggérée dans laquelle, comme dans la vie, les fous ne sont pas toujours ceux que l’on imagine.

Habillement ficelé, le scénar de Rodrigue Jean (qui a reçu les valeureux conseils de, notamment, Wajdi Mouawad) nous transporte dans des eaux troubles où, malgré leur apparente fonctionnalité quotidienne, des personnages cachent de profonds affects.

Et c’est en maugréant parfois contre le réalisateur que le spectateur se dandine sur son siège et se ronge les ongles. Jusqu’à la toute fin, on se demande, et c’est un compliment, où le manipulateur de marionnettes que nous sommes tente de nous amener. Puis, bang, il nous fracasse le souffle avec une fin entre-ouverte qui, se dit-on, n’aurait pu être différente.

Chargé de symboles qui empruntent à la tragédie grecque, Lost Song prouve encore une fois que l’on peut faire de l’excellent cinoche avec peu de moyens mais beaucoup de savoir-faire. **** Claude André


Crochet de gauche

Observateur des mœurs modernes, le cinéaste Rodigue Jeans boucle sont triptyque amorcé avec Full Blast et Yellowknife.

Claude André

Dans votre dernier film, on a l’impression que vous jouez avec nos nerfs et on se demande toujours où vous voulez nous amener. Or, au moment où on se lasserait, paf, une situation vient changer la donne. Comment arrivez-vous à mesurer avec une telle précision vos effets ?

Je pense qu’il n’y a pas tant de stratégies que d’organisation. C’est films-là se font de façon assez précise en ce qui a trait à la préparation. Que ce soit au niveau du cadre, du choix des acteurs etc…. De plus en plus dans les films le cadre et la couleur sont refaits, les objets peuvent disparaitre à la limite... Alors que nous on travaille encore de façon assez rigoureuse. Le cadre que l’on choisi est celui que l’on conserve et les prises ne sont jamais longues non plus. Ce n’est pas comme si on tournait une prise de 5 minutes pour en garder une seule. Donc l’expérience que vous vivez est aussi la nôtre et cela permet de juger de la scène en terme de supportable et d’insupportable, particulièrement dans ce cas-ci.

D’où vient l’idée de ce film ?

J’ai travaillé, depuis 25 ans, sur la pièce Le Médée d’Euripide, un classique de la tragédie grecque. J’avais écrit un scénario à l’époque, j’étais vraiment très jeune, et le scénario a évolué au fil des années. La question que je me posais était : qu’est-ce que serait devenu Médée dans un capitalisme totale comme aujourd’hui ? Dans un monde complètement dénué de tout où il ne reste que l’économie comme sens des rapports sociaux ? On dirait que ça a l’air à s’effondrer là, tant mieux, mais que ferait-il dans ce capitalisme absolu ? Voilà une des réflexions de ce film. Donc il y a mon intérêt pour Médée d’Euripide et également celui de savoir qu’elle est la nature de la bourgeoisie québécoise en ce moment ?

Vous vous intéressez à la contemporanéité alors ?


Oui. La question que je me pose à l’endroit du cinéma d’ici, particulièrement, c’est pourquoi est-ce que la plupart des réalisateurs font dans la nostalgie ? On retrouve de très nombreux films dont l’action se situe avant 1970. Soit avant que l’étranger n’arrive au Québec. Nous étions alors entre-nous dans un Québec tribal, pur et blanc. Je me suis donné un peu comme mission d’essayer de comprendre ce que cela représente. Car ce n’est pas vrai que nous sommes ruraux. Nous vivons dans les villes depuis très longtemps mais notre imaginaire est encore là. Pour moi qui viens d’Acadie, d’une région très éloignée, un film comme La Grande séduction fait figure de véritable une insulte. C’est très condescendant finalement.

Et le monde moderne dans Lost song ?

Ben c’est l’investigation de la nativité par un couple qui a réussi. Ils ont une carrière, ils sont bourgeois, se payent des vacances dans les Laurentides à tous les étés et qu’est-ce qui arrive lorsque ces gens là ont tout : la beauté, l’argent, la blondeur et que leur monde leur échappe… ?

Le dernier avec Luchini...


La Fille de Monaco

Un criminaliste (excellent Luchini) d’envergure se rend à Monaco pour défendre une vieille richarde qui a assassiné son gigolo. Puisque ce dernier était Russe, le gosse de la riche prévoit la présence d’un garde du corps (Roschdy Zem) pour le criminaliste. Malgré l’inimitié de l’avocat à l’endroit de son gorille, une complicité s’établira lorsqu’interviendra la sublissimme Louise Bourgoin. Une présentatrice de météo belle à faire bander un pape mais aussi arriviste qu’une Lola au cirque. Ainsi, le coup de foutre de Bertrand pour la bimbo permettra d’observer le contre-emploi d’un Luchini intello, bourge, maniéré et suintant d’éloquence s’encanailler auprès des noceurs de la place. Si l’étude des classes sociales s’avère divertissante et les conversations d’homme à homme parfois lumineuses, on regrettera que la réalisatrice Anne Fontaine n’ai pas songé qu’un avocat de droit criminel, habitué au monde interlope, ne tomberait pas aussi facilement dans les mailles d’une bimbo fut-elle aussi belle que Bardot. Entre deux placements de produits, on se dit «ok, il s’agit d’une comédie». Mais voilà qu’à la dernière partie du film, on demande au spectateur de changer complètement de registre en proposant une fin plus ou moins vraisemblable qui s’avère une petite leçon de morale. Divertissant mais déroutant. **1/2 (CA)

Le téléphone pleure



Ligne ouverte


Si vous vous attendez à voir Jeff Fillion, Gilles Proulx, André Arthur et autres populistes controversés et/ou caricaturaux propres aux lignes ouvertes, vous risquez de demeurer sur votre appétit. Il y a certes des personnages dans ce documentaire de Karina Goma mais ils sont plutôt du genre attachant.

Ainsi, ces chasseurs qui écoutent une radio d’Abitibi par esprit de clan, cet auditeur aphasique articulé dont les appels à l’émission Maisonneuve en direct on un effet thérapeutique des plus bénéfique et, surtout, cette relation qui dure depuis 20 ans entre une dame âgée et malade et son animateur, confident et mari par procuration André Pelletier, animateur à CKAC.

Ex fan des lignes ouvertes consacrées aux sports, Karina Goma propose une esquisse de petites gens de façon hyper (trop ?) respectueuse histoire de démystifier la détresse et la solitude des habitués de ces tribunes dont on annonce la disparition depuis des lustres. Si le rythme, sans narration, peut parfois s’avérer très (très) lent, le spectateur sortira ému de la rencontre culminant 20 ans de complicité nocturne téléphonique entre la dame malade et l’animateur André Pelletier après que ce dernier eut réalisé un vieux fantasme ; donner un tour de chant devant ses auditeurs. Correct. **.5 (Claude André)

À l'affiche au Cinéma Beaubien

vendredi 6 février 2009

De Piché au Cowboys


Bernadette
Éponyme
Disques Présence/Sélect
La nouvelle formation Bernadette qui s’inscrit dans la résurgence d’une certaine musique trad propose une première livraison aux reliefs folk, reggae et manouches. Entre les effluves de Paul Piché période pré-rasoir («l’eau lève») et ceux de la mouvance altermondialiste, Bernadette distille des textes intéressants sur des orchestrations inspirées, surtout aux guitares, même si on est loin de réinventer le genre. Soulignons quelques pièces très entraînantes dont «Merci pour la datcha» et «Mélodrame collectif» qui ne déplairont pas aux fans des Cowboys fringants. Parions que c’est sur scène que la formation prendra vraiment son envol flamboyant. Lancement le 10 février au Cabaret juste pour rire. *** (CA)

La bande à Comeau


Atréal
Hiver nordique
Disques RSB inc/MAPL

«La voie de dieu je l’ai cherché entre de longues jambes écartées», balance avec fulgurance le poète Fedric Gary Comeau de sa voix caverneuse sur «Colombe». Morceau où l’on peut entendre également des bons vieux accords de blues décapant. Le second album de cette formation qui ne dépaysera pas ceux qui avaient aimé le premier propose un voyage planant où poésie et échafaudages blues-rock, notons les cordes du trio Cordâme, accompagnent les longues routes crépusculaires de notre hiver assassin. On reprochera cependant la ton parfois un peu forcé de Comeau dans la façon de «dire» certains de ses textes au demeurant forts réussis. Notons que l’album fait très belle figue sur les palmarès alternatifs dont une première position à CIBL *** (CA)

Nouveau chapitre pour William Sheller


William Sheller
Avatars
Universal

Méconnu ici (Québec), William Sheller demeure en France une figure très respectée du public et de ses pairs qui mélange habilement musique savante et chanson pop. Rock et ballade. Il est d’ailleurs l’auteur du classique «Un homme heureux». Pour son 19 ième album de chansons, 4 ans après le piano-voix Épures, le symphoman offre un voyage de resquilleur d’identité internaute à travers des échafaudages de musique de chambre, d’électro, de pop et de références absolument beatlesques. Artiste complet et subtil, Sheller ne se laisse pas apprivoiser facilement et il faut faire un minimum d’efforts avant de saisir toute son ampleur. C’est ce qu’on vous souhaite. *** ½ (CA)

Ivy et le slam


Dégoupiller la langue

Le slammeur Ivy et ses musiciens s’apprêtent à jouer avec le public en utilisant des mots en guise ballon.

Claude André

Après quelques incursions dans le monde de la chanson disons plus orthodoxe avec notamment le duo Ivy et Reggie, Ivy devait, suite à un concours de circonstances qui l’a amené à s’y frotter, lancer les soirées slam au O Patro Vys il y a trois ans. Depuis, le genre rayonne de plus en plus et étend ses ramifications partout en province.

Il était donc tout naturel que cet émule de Sol propose un album où il reprendrait certains de ses textes présentés en public, Slamérica paru en mars 2008. Réalisé par Philipe Brault (Pierre Lapointe), l’opus a reçu, généralement, une chaleureuse accolade de la part des observateurs et des amoureux des mots.

C’est donc à une soirée orchestrée autour de ce disque et non à une compétition qui regroupe au moins 6 artisans de la rime comme c’est le cas lors des soirées slam que nous convient l’artiste et ses trois musiciens. «Tous les arrangements du disque sont dans le spectacle. C’est sûr qu’il y aura des textes a capella mais c’est tout un monde dans lequel je fais rentrer les gens petit à petit et en général, ça marche ! Et en plus on aura de l’éclairage et de la scéno, on se paye la traite quoi», explique celui qui a invité l’an dernier à Montréal Marc Smith, l’initiateur du slam dans les années 80 à Chicago.

Américanité


Car, contrairement à une croyance erronée, ce n’est pas la France et son illustre représentant Grand Corps Malade qui ont donné au monde ces soirées poético-ludiques mais bien le pays de Ginsberg et Burroughs.

D’ailleurs, en quoi le spectacle de Ivy sera-t-il différent de celui, très acclamé, de GCM présenté à la Place des Arts en octobre dernier ? «Oh my god. Ce n’est pas du tout la même chose. Je présente un show où la musique à une place vraiment différente que celle de Grand Corps Malade et il y a une évolution dans le spectacle. Pour l’occasion, je ne pas suis pas qu’un un slammeur qui déclame en avant, il y a également une interaction qui se développe avec le public. Une des grandes choses que j’ai découverte avec ce show là qui aura bientôt un an, c’est qu’avant j’angoissais un peu car je ne savais jamais trop comment prendre le public, asteure c’est davantage comme une relation qui évolue. Donc là, j’ai vraiment envie de me faire un cadeau, de me payer une rencontre privilégiée. Comme je suis conscient que ce que je dis n’est pas nécessairement aussi accessible qu’un Grand Corps Malade qui attire environ 70 % de Français dans ses spectacles ici, il me reste à me faire une place et il y aura aussi quelque chose de l’ordre de Fred Pellerin dans mon affaire. Mon terroir c’est plus la langue justement qu’un Grand Corps Malade qui, même s’il le fait très bien, propose surtout des contes rimés. Mon truc à moi, c’est un peu comme s’il s’agissait d’un voyage dans notre vision du monde à nous», poursuit Ivy qui espère présenter à l’automne 2009 une émission consacrée au slam sur les ondes de Vox.

Ivy
Slamérica
7 février 2009 à 20 h00.
Cinquième salle, PDA.
$16.88

Commentaire sur Being W


Georges W…. Bof

Karl Zéro et Michel Royer se sont offert une vraie fausse autobiographie en forme de bêtisier du pire président de l’histoire des États-Unis d’Amérique.

Claude André

L’ancien journaliste devenu humoriste et réalisateur Karl Zéro (Dans la peau de Jacques Chirac, César docu. 2007) et son complice proposaient au marché européen, pendant la dernière campagne présidentielle américaine, le «documentaire» Dans la peau de Georges Bush (Being W). Dans une perspective à la fois gauchisante, cynique et ironique, les deux zigotos retracent les deux mandats de Doubelliou à travers des images puisées de la télé et des scènes tournées pour l’occase avec le troublant acteur-narrateur-sosie Jim Meskimen. Entre «Bushims», images loufoques, genre Bush essuyant une fiente de pigeon, et faux monologue toutefois plausible en voix off, les habitués des grands titres de la politiques américaines n’apprendront rien de neuf tandis que les néophytes seront ahuris de constater à quel point l’«Amérique» était, pendant huit ans, sous le joug de l’illuminé «président le plus chrétien depuis l’inquisition». Réchauffé.

En salle dès le 6 février.

Commentaire sur le film Modern Love


On connait la chanson

Paris. Trois couples de trentenaires, un film dans le film, des départs, des retrouvailles, des chansons nunuches et vogue la galère.

Claude André

Il y a toujours un risque à présenter trois histoires qui se chevauchent au cinéma. D’une part ça peut devenir compliqué et d’autre part le spectateur peut, par exemple, trouver des personnages complètement décalés par rapports à d’autres. Et c’est le cas ici du couple formé par Vincent (Stéphane Rousseau en Fred Aster de pacotille) et Marianne (Alexandra Lamy, ouille ça fait mal) qui entre deux stepettes et trois chansons ringardes dont on se demande si ce n’est pas du pastiche, décalent des deux autres couple composés, eux, de comédiens somme toute convaincants.

Et ce décalage subsiste même si on a compris que le couple en question est en fait fictif, cinématographique.

Le triangle amoureux composé de François Martin Laval et ses deux prétendantes Mélanie Bernier et Clotilde Coureau s’avère assez intéressant (on y aperçoit également David La Haye) et on notera la convaincante performance de Stéphane Debac en «homme idéal» qui devrait plutôt être «un homme» selon Elsa (Berenice Bejo). Celle qui s’était pourtant jurée que de ne se maquer qu’avec l’homme parfait. Comme quoi, si certaines femmes préfèrent les hommes roses le jour, elles semblent préférer les machos la nuit…

De facture assez seventies, cette comédie romantique, parfois inutilement compliquée, tente d’établir un pont entre rêve et réalité rappellera la belle époque de Claude François aux plus vieux (pluvieux ?) et plaira sans doute aux jeunes filles (et certains garçons) en proie au complexe de cendrillon ou aux amateurs de sentiments sirupeux.

Bien qu’elle ne possède de modernisme que le titre, bonjour les clichés, l’œuvre mise surtout sur des acteurs associés à une nouvelle génération et demeure néanmoins sympathique. On en ressort toutefois en se disant : «bon, qu’est-ce je mange ce soir?». **

Modern Love de Stéphane Kazandjan sort en salle le 6 février

92 minutes.