Journaliste culturel au «Journal Métro» (ex «24 H», «Ici», «Ici et là»...) et recherchiste, je cause cd, ciné et livres entre des commentaires politiques, des entrevues et un zeste d'humour frelaté.
mardi 6 juillet 2010
Piché : entre ciel et terre
Haute voltige
D’abord télésérie, puis téléfilm, ce drame biographique raconte la démarche héroïque du commandant Robert Piché, sauveur de 306 passagers d’un airbus moribond en août 2001, et des expériences antérieures qui l’ont permise.
En utilisant une approche très conventionnelle mais efficace sur le plan de la réalisation, ce long métrage relève de façon convaincante le défi posé par la modestie du budget final grâce à l’acuité mise en œuvre lors de la scène du vol historique, au jeu des Côté père et fils et, notamment, aux images en Jamaïque.
Ce qui nous rendra indulgent face à quelques anomalies telles l’ambulance format nord-américain aux Açores, l’enseigne un peu risible du centre de détox ou les blagues de mononc’. Enlevant. *** 1\2 (CA)
Entretiens :
Le réalisateur de secours
-Sylvain Archambault
Au départ, Érick Canuel devait réaliser de film. Est-ce que votre approche a suivi celle déjà établie ou vous avez complètement transformé le scénario ?
Le scénario était très valable mais ce n’était pas le genre de film que je voulais faire. Il s’agissait davantage d’un film d’action alors que moi j’ai pensé qu’on gagnerait plus à utiliser l’angle humain et à explorer la psychologie du personnage plutôt que l’aspect spectaculaire.
Vous brosser un parallèle évident entre le fait de prendre en main le destin des passagers et celui de le faire avec sa propre vie en lorsque l’on est alcolo et/ou toxico. Est-ce que selon vous, si Piché n’avait pas été de ce type de personnalité qui flirte avec l’abîme, il aurait eu l’instinct qu’il fallait au moment crucial ?
Je pense que le sang froid qu’il a dû développer en prison a été fondamental dans ses capacités à contrôler ses émotions et d’agir de la bonne façon. Il le dit lui-même, s’il n’avait jamais fait de prison, donc jamais eu la témérité de sa jeunesse qui l’y a conduit, il n’aurait jamais pu faire atterrir l’avion.
On voit souvent des passagers qui captent des images avec leur caméscope pendant la très réussie et stressante scène du vol historique. N’y aurait-il pas eu moyen cependant d’insérer de vraies images de passagers réels au film ?
Je ne pense pas qu’il y ait eu des vraies images de ces événements. J’ai inventé cela pour changer la texture du film. Il y a quelque chose de très crédible dans ce genre d’images qui fait en sorte que nous sommes encore plus présents, plus là. Mais oui, j’aurais adoré ça insérer des vraies images. Mais les passagers étaient des gens qui partaient de Toronto pour aller à Lisbonne, donc nous n’avions pas vraiment accès à cela…et il aurait fallu demander les autorisations etc…
-Robert Piché
L'art de planer
Le fameux 360 degré que vous avez décidé d’effectuer en plein vol et pour lequel le contrôleur aérien des Açores s’exclame : «il est fou !», l’auriez-vous fait si vous n’aviez pas été un homme qui brûlait la chandelle par les trois bouts ?
Oui. Il s’agit d’une procédure que l’on fait habituellement en aviation lorsque l’on est trop haut. Moi, c’était surtout pour calmer le copilote qui en souhaitait un et ne pas perdre mon leadership que je l’ai fait. Quant au contrôleur aérien, il connait son domaine à lui... Un avion ça ne vole pas à cause de la réaction d’un moteur mais bien en raison de la réaction de l’air sur les ailes. Puisque que nous atteignions avait certaine vitesse en raison de la descente, nous pouvions faire ce que nous voulions avec l’avion malgré les moteurs qui ne fonctionnaient pas.
Est-ce votre passage en prison qui vous a permis de bien réagir au moment fatidique ?
Moi j’ai fait de la prison en Géorgie au nord de la Floride. Lorsque tu rentres là, tu n’as pas le choix de développer ton instinct de survie. Tu vis dans un milieu très hostile où la menace de l’attaque physique ou sexuelle est présente 24 heures par jour. La survie, tu n’en as pas besoin lorsque tu vis dans le monde normal, mais seize ans plus tard, je crois que mon cerveau, mon subconscient, se sont souvenus et m’ont donné les mêmes outils pour m’en sortir. Donc oui, ça été primordial le fait que j’aie déjà fait de la prison pour atterrir ce vol là.
Les scènes de prison relèvent quand même du folklore un peu, non ?
Pas pantoute mon homme. Tu vis dans une mini société où il n’y a pas de femmes. Ça se passe exactement comme à l’extérieur. Il y a des forts, des faibles, des gens qui rejoignent le camp des puissants. Nous autres du vendredi soir à 20 h00 au dimanche soir à 23 h00, c’était le free for all. L’alcool frelatée sortait, puis la dope, les punks s’habillaient comme des filles…Le gars qui est en dedans depuis 15 ans, sa pulsion sexuelle, il faut bien qu’il la sorte à quelque part.
D’aucuns vous ont reproché d’avoir transgressé une tradition propre aux associations anonymes en dévoilant votre appartenance aux AA dans le magazine La Semaine…
Il y a beaucoup d’écoles de pensée là-dessus… Je ne suis pas arrivé à la revue en disant : «Écrivez que je suis dans les AA», mais il y avait tellement de journalistes qui me harcelaient afin de savoir si j’avais arrêté de travailler à cause d’un abus d’alcool…Ils me suivaient pas à pas avec une caméra jusque dans les restaurants histoire de vérifier si je prenais un coup… J’en ai donc parlé à ma femme et d’un commun accord on a décidé de rendre la chose publique. Je me suis ensuite assis avec M. Charron de La Semaine et il m’a dit, lui qui est également un membre : «Je vais embarquer avec toé».
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2 commentaires:
Est-ce votre passage en prison qui vous a permis de bien réagir au moment fatidique ? une question tres interessante.
cette phrase du commandant Piché tirée d'un texte des Martin Bisaillon me fait réfléchir:
''Quand tu es en prison, tu vois l’être humain et l’animal. Les détenus sont souvent des gars qui ont été battus et abusés. Un moment, je n’ai pas eu le choix, j’étais au pied du mur quand j’ai menacé un gros gars avec un faux couteau. Cette sensation d’être au pied du mur, je l’ai vécue de la même manière quand j’ai perdu mon deuxième moteur. J’ai ressenti le même état de survie.»
tres interesssesant le commandant. Piché, un héros qui avait ses démons. Capable des menacer un homme et d'en sauver d'autres Spécial.
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