30 ans dans les dents !
Avant le désormais très célèbre Paul, la bédé québécoise a
enfanté un autre personnage qui a fait le bonheur de milliers de
lecteurs : Red Ketchup! Pour
souligner les 30 ans du réputé agent du FBI qui carbure à la coke et à l’antigel,
la Pastèque réédite l’intégrale de l’œuvre qui a vu le jour dans le défunt et
regretté magazine satirique Croc.
Entrevue croisée avec Pierre Fournier (scénariste) et Réal Godbout (dessinateur
et coscénariste) à l’occasion de la parution du couteau Aztèque et du tome 1 des recueils.
Dans le conflit entre
le gouvernement Charest et les étudiants, qu’aurait fait Red Ketchup?
Godbout : Généralement, il est du côté du pouvoir, ce
qui n’en fait pas quelqu’un de toujours sympathique. Il taperait probablement
sur des manifestants dans la rue. C’est un peu ça le personnage.
En relisant les Red, on se rend compte que la coke était
dans l’air du temps des années 80. Faisait-elle partie du matériel créatif?
Godbout : Dans mon cas, non. Avant même que je fasse Red Ketchup, j’ai gouté au cannabis et
si cela a été un moment un déclencheur, je me suis dit qu’il me fallait en
sortir car j’étais davantage productif lorsque je n’en prenais pas. Quant à la
coke, ça m’a toujours tombé sur les nerfs. Beaucoup de gens autour de nous en
consommaient à l’époque du Croc et je
n’aimais pas l’effet désagréable que cela produisait chez eux. Si on fait des
allusions à cette substance dans Red,
c’est plutôt par dérision.
Quel parallèle
pourrait-on brosser entre Red, qui
évoluait à l’époque de Reagan et Tatcher, et notre contemporanéité?
Fournier : Bien que Red
fût conçu pour divertir, il s’agissait quand même une charge contre les films
d’action un peu cons et bruyants. Effectivement, nous évoquions l’actualité par
la bande. On a connu Bush et les montées de la droite un peu partout à l’époque
et cela est encore en plein dans l’actualité. Bref, c’est un peu comme si nous
avions fait un cycle complet.
Vous ne semblez pas
avoir vraiment joué la carte commerciale à l’époque : dessins animés, figurines,
t-shirt, etc.
Fournier : Non, nous nous sommes tenus éloignés de ça.
Je crois que Croc, où nous
travaillions, a lancé un t-shirt pendant quelques mois en guise de promo. Nous
n’étions pas trop partisans d’une exploitation commerciale qui aurait sans
doute eu pour effet de diluer le personnage.
L’état de la bédé au
Québec?
Godbout : On voit des auteurs qui commencent à être
connus et qui obtiennent une belle reconnaissance. On peut établir un parallèle
avec le cinéma québécois. Au début des années soixante, il y avait quelques
fous qui faisaient des films et on s’efforçait un peu, par patriotisme, d’aller
les voir. Aujourd’hui, un grand nombre de films québécois sont produits et on
ne se pose plus de questions avant d’y aller. Je crois qu’avec la bédé on se
dirige vers cela.
Est-ce que Red, tout comme Paul, sera un jour
adapté au cinéma et quel acteur le personnifierait dans vos fantasmes?
Fournier : Nous avons des pourparlers à ce sujet tous
les ans et cela depuis longtemps. C’est très long et dispendieux une adaptation
au cinéma. On le ferait en personnages réels et non en dessins animés.
L’acteur? Quand on a écrit Red Ketchup,
on s’est inspiré de l’acteur Jack Lord, la vedette de la télésérie Hawaï 5-0 mais là, aucune idée. Tu as des suggestions ?
Pierre Fournier et Réal Godbout, les créateurs de Red Ketchup. |
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