lundi 28 mai 2012

Grimskunk : fidèle au poste !




Fidèle au poste!

Formation phare du punk/métal kèbe, les vétérans de Grimskunk reviennent en force avec un 8e album enregistré en Australie où s’exprime la colère sociale sur des rythmes qui ne déplairont pas aux fans des Beatles, Pink Floyd et autres Led Zeppelin. Discussion avec Joe Evil, claviériste et chanteur.

Claude André

Pourquoi l’album a-t-il été enregistré en Australie?
À l’origine, nous devions l’enregistrer à Vancouver, mais ça n’a pas fonctionné pour des raisons d’horaire et d’urgence médicale qui touchait la fille de notre réalisateur. Comme nous avions pris des contacts en Australie avec notre boite de disques, qui vient d’y ouvrir une succursale, cela nous a permis d’habiter chez un ami et éviter ainsi des frais d’hôtel. En plus, on nous proposait d’effectuer une tournée. Nous avons donc décidé d’aller respirer l’air chaud. D’autant plus qu’on y retrouve une bonne scène métal et que les gens sortent beaucoup pour assister à des concerts.

On remarque sur cet album une touche psychédélique. Nostalgie de la musique de votre adolescence?
C’est sûr qu’il y a beaucoup d’influence des Beatles et de Pink Floyd dans notre démarche. Mais cela est aussi imputable au fait que notre réalisateur, Gus Van Go, tenait à amener un son rétro. Après avoir entrepris des recherches, nous avons déniché en Australie une vieille batterie Ludwig de l’année1972, un ampli Vox1974, en plus de vieilles guitares et de micros rares typiquement australiens. Grimskunk a toujours été un petit peu psychédélique/prog et cette fois le côté psychédélique ressort davantage. Cela dit, ce n’était pas nécessairement conscient au départ.

Au regard de tous ceux qui y ont laissé leur peau par excès de toutes sortes, vous considérez-vous comme un survivant du rock?
Nous sommes assurément des survivants de l’alternatif québécois. Il s’agit de notre 8e album et on commence à poigner la mi-quarantaine. C’est quelque chose d’assez particulier que de faire ce genre de musique aussi longtemps, c’est sûr.

On retrouve sur Set Fire! deux pièces en français. Volonté de conserver vos racines même si vous visez la scène internationale?
Oui. On vient de Montréal et une grande partie de nos ventes de disques se réalise au Québec. On aime aussi l’idée que le public québécois puisse capter à 100 % notre message. Mais, comme nous sommes un band international, nous n’avons pas d’autres choix que de mettre l’accent sur l’anglais. Cela se fait sans effort cependant, nos chansons francophones viennent avec l’inspiration.

Les spectateurs de vos concerts ont davantage la vingtaine ou la trentaine que la quarantaine. N’avez-vous pas parfois l’impression de vivre un clash entre votre vie civile et votre vie de rocker?
Ça s’en vient. Peut-être pas encore, mais je peux le voir arriver. Nous avons tous 40 ans dans le groupe et c’est sûr que nous ne vivons plus comme lorsque nous avions 21 ans. Nous avons des ados, alors ça change la dynamique en ce qui a trait à notre vie personnelle. Ce qui n’empêche pas notre vie de musiciens de drôlement ressembler à celle de l’époque où nous avions 24 ans. Si les excès sont moins excessifs? Un petit peu, ouais.

Bonus tracks :

L’inspiration était sans doute u rendez-vous car vous avez réussi un super reggae/métal en français avec Un jour. Vous aviez fumé un méga pétard?
(Rires) Exactement. L’inspiration était au rendez-vous. Dès nos débuts, en 1988, nous avions la volonté d’intégrer plusieurs styles musicaux au punk et au métal.

À votre avis, Joe, existe-t-il une date de péremption pour demeurer un rocker sérieux?
Euh! non, j’en ai pas encore connu. Les Stones? Ça fait presque 30 ans qu’ils n’ont pas fait un hit. Mais un concert des Stones, ça reste de la bonne musique. Je suis conscient quand même que le rock demeure une affaire de jeunes. En vieillissant, tu deviens comme AC/DC ou les Rolling Stones : gris, gros sur le stage et chauve. Ce n’est plus comme dans la vingtaine ou la trentaine, mais les gens viennent pour écouter de la musique. C’est une affaire de passion et non de mode. Et puis les 40 ans sont les nouveaux trentenaires. Maintenant des gens arborent des piercings et des tatouages, mais écoutent de la musique complètement dance et pop. Ton médecin qui a n’a jamais fumé un joint est maintenant tatoué… Nous sommes désormais plus ouvert socialement en ce qui a trait au look, mais c’est vrai que nous n’avons pas toujours les mêmes valeurs que les gens qui ont 20 ans.

Avec votre collègue Vincent Peake, vous avez participé au retour de Lucien Francoeur & Aut’Chose, il y a quelques années. Est-ce que des spectacles ou un nouveau disque sont au programme?
Finalement, on a fait l’album et quatre ou cinq shows, puis on a tout arrêté. C’était trop compliqué, notamment en raison des conflits d’horaire.


dimanche 27 mai 2012

La loi 78, on s'en tape !


samedi 19 mai 2012

Avis à la police du quartier

Merci MC Gilles. M'est avis que ce n'est pas fini...

Red Ketchup : 30 ans dans les dents !


30 ans dans les dents !

Avant le désormais très célèbre Paul, la bédé québécoise a enfanté un autre personnage qui a fait le bonheur de milliers de lecteurs : Red Ketchup! Pour souligner les 30 ans du réputé agent du FBI qui carbure à la coke et à l’antigel, la Pastèque réédite l’intégrale de l’œuvre qui a vu le jour dans le défunt et regretté magazine satirique Croc. Entrevue croisée avec Pierre Fournier (scénariste) et Réal Godbout (dessinateur et coscénariste) à l’occasion de la parution du couteau Aztèque et du tome 1 des recueils.


Dans le conflit entre le gouvernement Charest et les étudiants, qu’aurait fait Red Ketchup?
Godbout : Généralement, il est du côté du pouvoir, ce qui n’en fait pas quelqu’un de toujours sympathique. Il taperait probablement sur des manifestants dans la rue. C’est un peu ça le personnage.

En relisant les Red, on se rend compte que la coke était dans l’air du temps des années 80. Faisait-elle partie du matériel créatif?
Godbout : Dans mon cas, non. Avant même que je fasse Red Ketchup, j’ai gouté au cannabis et si cela a été un moment un déclencheur, je me suis dit qu’il me fallait en sortir car j’étais davantage productif lorsque je n’en prenais pas. Quant à la coke, ça m’a toujours tombé sur les nerfs. Beaucoup de gens autour de nous en consommaient à l’époque du Croc et je n’aimais pas l’effet désagréable que cela produisait chez eux. Si on fait des allusions à cette substance dans Red, c’est plutôt par dérision.

Quel parallèle pourrait-on brosser entre Red, qui évoluait à l’époque de Reagan et Tatcher, et notre contemporanéité?
Fournier : Bien que Red fût conçu pour divertir, il s’agissait quand même une charge contre les films d’action un peu cons et bruyants. Effectivement, nous évoquions l’actualité par la bande. On a connu Bush et les montées de la droite un peu partout à l’époque et cela est encore en plein dans l’actualité. Bref, c’est un peu comme si nous avions fait un cycle complet.

Vous ne semblez pas avoir vraiment joué la carte commerciale à l’époque : dessins animés, figurines, t-shirt, etc.
Fournier : Non, nous nous sommes tenus éloignés de ça. Je crois que Croc, où nous travaillions, a lancé un t-shirt pendant quelques mois en guise de promo. Nous n’étions pas trop partisans d’une exploitation commerciale qui aurait sans doute eu pour effet de diluer le personnage.

L’état de la bédé au Québec?
Godbout : On voit des auteurs qui commencent à être connus et qui obtiennent une belle reconnaissance. On peut établir un parallèle avec le cinéma québécois. Au début des années soixante, il y avait quelques fous qui faisaient des films et on s’efforçait un peu, par patriotisme, d’aller les voir. Aujourd’hui, un grand nombre de films québécois sont produits et on ne se pose plus de questions avant d’y aller. Je crois qu’avec la bédé on se dirige vers cela.

Est-ce que Red, tout comme Paul, sera un jour adapté au cinéma et quel acteur le personnifierait dans vos fantasmes?
Fournier : Nous avons des pourparlers à ce sujet tous les ans et cela depuis longtemps. C’est très long et dispendieux une adaptation au cinéma. On le ferait en personnages réels et non en dessins animés. L’acteur? Quand on a écrit Red Ketchup, on s’est inspiré de l’acteur Jack Lord, la vedette de la télésérie Hawaï 5-0  mais là, aucune idée. Tu as des suggestions ?



Pierre Fournier et Réal Godbout, les créateurs de Red Ketchup.


dimanche 6 mai 2012

Chinatown et les sexy sixties





Et la lumière fût

Avec un 2e album en bandoulière, les cinq garçons dans le vent de la formation Chinatown partiront à l’assaut du Québec au cours des prochains mois, en plus de réaliser un clip pour chaque nouvelle pièce. Un spectacle acoustiques avec cordes et une relecture de toutes les chansons de Comment j’ai explosé en version jeux vidéo sont également au programme. Rencontre avec Félix Dyotte, Pierre-Alain Faucon (PAF) et Toby Cayouette.

Claude André

Votre album s’intitule Comment j’ai explosé. Au moment de le choisir, aviez-vous en tête une métaphore sexuelle ou une vision prémonitoire du succès à venir?
(Trio de rires)
Félix : La réponse est non.
Toby : Il arrive très souvent, et c’est surprenant, que l’on soit inconsciemment influencé par des courants sociaux dont nous ne comprenons la teneur que quelques mois plus tard. Par exemple, il y a eu une chanson au début de l’année 2001 qui évoquait New York sous les flammes. C’était neuf mois avant les événements du World Trade Center… (Note : Le Grand incendie de Noir Désir)

Il y a trois ans, vous avez lancé Cité D’Or. Est-ce que cela vous a permis de connaître la gloire, le succès et les femmes?
Félix : Un peu des trois! Nous sommes au Québec, donc nous n’avons reçus que des échantillons gratuits d’un peu tout ça. Maintenant, nos réserves sont à sec, voilà pourquoi on sort un nouvel album (rires).

Terminez la phrase suivante : avec Comment j’ai explosé, la formation Chinatown propose une approche toujours imprégnée des sixties mais plus rugueuse…
Félix : C’est plus rugueux, mais en général il y a aussi plus de texture sur cet album. Il respire davantage et se laisse explorer : on peut le réécouter à plusieurs reprises et percevoir chaque fois de nouvelles couches. Bien sûr, c’est toujours sixties, cependant on s’est rendu compte qu’il ne s’agissait pas d’un style volontaire mais plutôt d’une façon d’écrire des chansons qui correspond à un mouvement né dans les années soixante. Nous vivons dans une société d’immédiateté où l’on semble croire que ce qui s’est produit dans le passé doit y demeurer. Or, s’il est vrai que nous reprenons des éléments issus de cette époque, il n’y a aucune raison pour qu’un style musical meure.
Toby : À quelques exceptions, le côté sixties se situe davantage dans la sensibilité du songwriting que dans les arrangements et les sonorités. C’est surtout notre structure chansonnière qui vient de cette période. Hormis quelques pièces, l’aspect sixties est beaucoup moins présent que sur le premier album.

Et toi PAF, qu’en penses-tu?
J’expérimente des façons d’écrire qui se rapportent à la tradition des chansons sans auteur. Comme l’étaient les vieilles chansons de marins imaginées par des gens qui ne pouvaient pas écrire en ramant. Cette tradition est beaucoup plus ancienne que les sixties.

Ce nouvel album est plus étoffé musicalement que le premier, mais moins accessible de prime abord. Est-ce une volonté d’être désormais perçus comme un groupe plus sérieux?
Toby : Cette ambition était présente dès le départ, sauf que cette fois nous ne nous sommes pas empêchés de la suivre. C’est aussi pour cela que nous avons réalisé le disque nous-mêmes. Il s’agit donc d’une synthèse de nos cinq visions de la musique. Cela dit, on ne s’est jamais demandé ce que les gens penseraient de cette approche, car on a d’abord fait cet album pour nous.
Félix : On acquiert des outils avec l’expérience et on se sentait prêts à le réaliser. Ce qui n’était pas le cas du premier album, pour lequel nous avions besoin d’une lumière pour nous guider. Cette fois, la lumière, ce sont nos ambitions personnelles.

Comment j’ai explosé est présentement en magasin.


samedi 5 mai 2012

Yann Tiersen et son cinéma pour aveugles



Cinéma pour non-voyants

Imaginez un Ennio Morricone trash qui aurait composé la trame d’un film post-apocalyptique et vous aurez une idée de ce à quoi peut ressembler le nouveau disque de Yann Tiersen.

Moins d’un an près le sublime Dust Lane, le multi-instrumentiste Yann Tiersen dégoupillait Skyline qui vient d’atterrir dans nos contrées. Un autre objet radioactif presque entièrement instrumental qui distille un post-rock/noise mélodique sous haute tension. Ce qui ne déplairait pas à un Morricone devenu trash.

Créé à Paris, San Francisco et en Bretagne, Skyline pourrait très bien, pour les oreilles non aiguisées, donner l’impression d’émerger du même élan créatif que son prédécesseur. « Les deux sont assez rapprochés dans le temps, donc ils sont assez proches, quoique Skyline soit complètement différent. Moins sur les textures, moins sur les guitares et plus sur les synthés analogiques », analyse Tiersen au bout de l’onde en admettant du bout du lèvres qu’ils sont peut-être cousins.

Quant à sa méthode de création, ce n’est pas Tiersen qui livrera le secret de la Caramilk. « Je n’ai aucun instrument de prédilection ni de recette particulière. J’aime bien me laisser porter. Je pars toujours d’une idée de base assez simple, qui peut-être répétitive, et je construis à partir de cela », avance le créateur, qui n’aime pas intellectualiser son art. « On ne peut pas avoir d’influences musicales lorsqu’on essaie d’être honnête. Dès que l’on sent des influences, on s’en détache instinctivement », poursuit cette figure de proue du post-rock. La mort du rock? « Faux débat. On vit une époque dense. On a accès à toutes les cultures, à toutes les musiques et tout cela se mélange et évolue. La musique évolue aussi », tranche le créateur encore très associé à la bande sonore du méga succès Le fabuleux destin d’Amélie Poulain.

Putain de destin

Il semble d’ailleurs éprouver un étrange rapport avec ce film. Ras-le-bol d’en causer? « Cela m’est égal. J’ai rien contre, il m’a fait connaître dans le monde entier, mais je n’ai pas créé cette musique pour ce film », lance-t-il le ton désabusé. Et lorsqu’on lui demande, narquois, s’il compte revenir un jour à ces images d’Épinal musicale de Paris, le pote de Christophe Miossec se rebiffe : « Moi, je suis né en Bretagne. Nous avons passé des siècles en guerre contre les Français. Je ne suis pas du tout lié à l’image d’Épinal parisienne. L’accordéon est pour moi un instrument celtique. » « Peut-être, mais il a servi à cette image, un peu bluette, dans le film », relance l’intervieweur. « Justement, mes morceaux n’étaient pas liés à cela. Ils ont été tirés de mes premiers albums. Moi, autant je cautionne le film, j’aime bien son côté suranné noir et son côté humaniste, autant je n’aime pas du tout son côté parisien et français. Or, précisément, c’est parce que je ne suis pas en accord avec le film que ça m’a un peu gêné d’être collé à cette image », conclut-il.






vendredi 4 mai 2012

On se fait tous fourrer !



Le mépris et l'entêtement d'Alexandre Chartrand


L’art de la provoc’

Bénéficiant d’une certaine sympathie dans le milieu du cinéma underground, grâce à son long métrage de fiction La Planque (2004) ainsi qu’à son documentaire sur le peintre d’envergure Serge Lemoyne (2005), Alexandre Chartrand, également peintre, présente une troisième expo à la fois provocatrice et engagée qui promet de brasser la cage : On se fait tous fourrer!

Claude André

Votre exposition s’intitule On se fait tous fourrer! Pourquoi?
Je suis un peintre engagé et dénonciateur. Pour cette expo, j’ai décidé d’aller droit au but. Les tableaux ont également un aspect caricatural, car j’ai représenté, sans détour, des gens qui se font fourrer dans le sens strict de l’expression. Pour ce faire, j’ai, notamment, mis l’accent sur les visages.

Êtes-vous influencé par Magritte?
Oui. On se souvient tous de son œuvre Ceci n’est pas une pipe, qui illustrait une pipe. J’essaie, comme lui, que les titres de mes œuvres aient autant d’importance que les représentations elles-mêmes.

Comment on en vient à faire une expo sur cette thématique?
Ça fait longtemps que je suis désenchanté par la politique. Les politiciens font, en général, davantage partie du problème que de la solution. Je trouve qu’il y a trop peu de gens qui s’intéressent à la chose politique et je me disais que la peinture, à la fois ludique et très colorée, pourrait attirer les regards. Il faut dire que si le sujet semble à la mode en ce moment, il ne l’était pas au moment où j’ai eu cette idée d’expo, il y a deux ans.

Cette expo est donc volontairement racoleuse.
Exactement. Généralement, lorsque je peins, je m’inspire de photos que j’ai prises moi-même de mes sujets. Dans ce cas, j’ai travaillé avec de photos glanées sur Internet, en cherchant délibérément la provocation par l’intermédiaire de la pornographie.

On retrouve même la reine d’Angleterre en position, disons… inhabituelle.
Oui, c’est le clou de l’exposition et ce geste est, par sa nature, illégal au sens de la loi, car il est interdit de représenter la reine sans son consentement. Je n’ai pas commencé par cette image, mais j’ai tellement trouvé effrontée la venue du couple royal après leur mariage que je me suis dit qu’il me fallait émettre un commentaire sur la monarchie. Cela semble anodin, mais le fait que nous soyons encore une colonie, que l’on ramène encore l’appellation « royale » dans les institutions, que l’on paie à ces jeunes un voyage pour venir rire de nous en pleine face et nous rappeler que nous sommes encore sous domination, m’apparaît totalement déplacé. Ces gens sont quand même les descendants des grands dictateurs de l’histoire européenne.

Vous présentez cette expo dans une galerie de l’Ouest de l’île, double provocation?
Oui et non. Ce n’était pas aussi flagrant qu’il ne paraît, car j’en suis à ma troisième expo à cet endroit. Je m’entends particulièrement bien avec la propriétaire de la galerie. J’ai pu lui proposer mon concept verbalement et elle l’a accepté d’emblée. Cela dit, je suis bien content, car l’emplacement de la galerie a pour effet de confronter plusieurs personnes. Il y a déjà des gens qui se sont plaints du mauvais goût de ma série.

Et il serait imputable, selon vous, à l’aspect politique ou pornographique de l’expo?
L’aspect politique. Parce que des gens nus, en peinture, ça pleut. C’est surtout le fait d’avoir associer la reine à la porno qui choque. D’autant plus que je lui ai donné un titre assez salé…

Lequel?
À faire bander Stephen Harper…




  
Le tableau titré Le Mépris et l’entêtement  (voir au sommet du texte) qui a été ajouté in extremis à l’expo a rapidement trouvé preneur et les 1779,00 $ demandés symboliquement pour son acquisition seront entièrement remis à la CLASSE en signe de soutien au mouvement étudiant. « En tant que non étudiant, je me suis demandé de quelle façon je pouvais soutenir le mouvement et manifester mon désaccord avec la position du gouvernement Charest sur la hausse des frais de scolarité. J’ai participé aux marches, j’ai transmis les textes sur ma page Facebook, j’ai signé des pétitions. Mais je me rends compte que je dois parler le même langage que Charest pour qu’il cesse de nous ignorer : le langage de l’argent! »

On se fait tous fourrer!, dès le 2 mai à la galerie Point Rouge.

jeudi 26 avril 2012

Paris canaille en musique



Paris canaille

Amateurs de chanson française et de poésie encanaillée, le trio Rue de Lappe vous fera plonger dans le Paris des amours sublimés au son de l’accordéon et de l’orgue de Barbarie avec, en prime, la rare présence du poète/parolier Roger Tabra.

C’est à travers des chansons de Boris Vian, Aristide Bruant, Ferré, Reggiani, Aragon, Caussimon et autres Mouloudji que le trio nous fera plonger dans le Paris immortalisé par les photos de Doisneau au cours de cette soirée qui sera magnifiée par la présence d’un enfants de la goualante, le parolier Roger Tabra.

Bien connu pour ses textes chantés par Éric Lapointe, France d’Amour et, notamment, Diane Dufresne, Tabra a également endisqué des albums quasi introuvables qui sont de véritables trésors.

Il nous gratifiera ce soir là de trois nouvelles chansons dont La Mélancolitude et la magnifique La poésie qu’il nous est loisible d’entendre sur Youtube. «La Rue de Lappe est l’une des petites rues du Paris que j'aimais et qui devenue maintenant une rue branchée, c’est moche. Mais le groupe reprend avec amour ces vieilles chansons que j'aimais aussi  et les raconte avec une certaine gouaille qui me plait», lance Tabra en deux volutes de tabac noir en rappelant que le grand Francis Lemarque est né sur cette rue.

Une présence rare

«J'ai d'abord dit oui à mon ami Émilio qui m'est cher parce que c'est aussi l'occasion pour moi de remonter sur scène près de 7 ans plus tard. J’y interpréterai quelques chansons qui seront sûrement un peu plus sombres que les leurs mais c'est Tabra... J'y vais aussi parce si cela peu l'aider à gagner quelque voix, j'en serai fort heureux. Je les aime ces gars là», conclue le parolier de sa voix de canailles truffée d’argot qui doit ressembler à celle des voyous qui fréquentaient les cafés-charbon et les filles de joie de cette rue, située dans le quartier Bastille dans le 14ième arrondissement, qui a vu naitre les premiers bal musettes en 1880.

Le trio, qui en sera à son premier spectacle à Montréal, est composé de Emilio Armilles au chant et à la guitare, de Frédéric Gateau au chant et à l’accordéon et de Pascal Brenot à la contrebasse.



Samedi 28 avril à 20h
Studio théâtre de la Place des Arts
Infos : 514-842-2112

mercredi 25 avril 2012

André Pratte, l'homme de tous les services

Un éditorialiste toujours Pratte à servir la bonne cause...


                                      Une autre caricature de l'excellent  Yvon Roy

samedi 21 avril 2012

Le Plan Nord

Le Plan Nord vu par Yvon Roy.

http://roycaricatures.wordpress.com/

L'exil selon Gabriel Anctil


Choisir l’exil

Passionné de  Kerouac et marqué par l’œuvre de Michel Tremblay et sa petite musique joualisante, l’auteur Gabriel Anctil fait, avec son premier roman Sur la 132, une entrée tonitruante dans notre paysage littéraire.
  
Votre personnage Théo, avant de partir à Trois-Pistoles, évolue dans le milieu de la pub. Peut-on établir un lien avec 99 Francs de Beigbeder ?
Je ne l’ai pas lu et Beigbeder ne figure pas parmi mes auteurs préférés. La publicité ? Je ne pense pas que cela apporte beaucoup de choses positives. Si j’ai voulu situer mon personnage dans ce milieu, c’est qu’avec son ancrage dans la superficialité et l’image, il me semblait le plus opposé à la région.

La thèse de votre roman est donc la quête de soi, la quête du sens ?
Oui, Théo n’a jamais été plus loin que la ville de Québec. Il a vécu, après l’université, dans une bulle hermétique avec des gens qui pensent et vivent comme lui. Ce qui fait en sorte qu’il ressent tout un clash culturel lorsqu’il  arrive en région mais sa quête le poussera à s’ouvrir aux autres dont quelques babys boomers.

Contrairement au discours ambiant (Martineau, Buck-Côté, Duhaime) vous êtes, à 32 ans, fasciné par les boomers et semblez vouloir en quelque sorte les réhabiliter…
Je me suis réconcilié avec eux en écrivant le roman. Ma conception du Québec ne s’articule pas autour de l’idée d’une guerre entre les générations mais plutôt dans esprit de continuité. Je crois, contrairement à ceux que vous venez de nommer, que chaque génération doit nourrir la suivante. Je suis aussi fasciné par les boomers car ils ont évolué dans un contexte qui est difficile à imaginer aujourd’hui. Ils avaient un peu plus de 30 ans en 1976 lorsque le Parti Québécois est arrivé au pouvoir. Collectivement, ils ont vraiment essayé beaucoup de choses et sur le plan culturel, ça demeure la génération qui a été la plus forte au Québec.

Vous pensez pas que cette génération a fait un gros party et que c’est la suivante, la X, qui a eu la gueule bois ?
(Rires) Oui, vous en avez vraiment plus bavé que nous. Dans le milieu du travail il est vrai qu’ils ont occupé tous les postes mais je les vois partir depuis deux ou trois ans. Mon personnage, qui ne connaît rien du Québec, rencontre Clermont, un vieux militant boomer qui l’invite à regarder les élections et l’éveille à la politique.

Votre intention d’auteur était-elle de secouer votre génération ? La trouvez vous aphasique à l’égard de la politique ?
Oui, mais ma réflexion a changé depuis quelques semaines avec le mouvement étudiant. Avant cela, j’étais plutôt découragé par le faible pourcentage de gens de ma génération qui se rendent voter. Mais les plus jeunes sont en train de prouver à tout le monde que ce n’est pas une génération d’égoïstes, qu’ils sont très articulés et pourvus d’une vision d’avenir. Cela me rempli d’espoir.

Comme votre personnage, vous avez vécu en région. Votre souvenir le plus marquant ?
À Trois-Pistoles presque chaque coin de rue est associé à une légende. Ça m’a profondément marqué. La ville existe depuis 350 ans et avant on y retrouvait des Amérindiens. Il y a tout un imaginaire qui entoure cette  région. L’église par exemple est associée à une légende que j’ai reproduite, en l’adaptant, dans mon roman. Sans parler du paysage qui est vraiment extraordinaire.

Sur la 132 est disponible en librairies



Gabriel Anctil est né en 1979 à Montréal. Sur la 132 est le premier roman qu’il publie mais il en a écrit d’autres. Il a publié des textes sur Kerouac dans Le Devoir et bosse à Télé-Québec où il est chargé des achats de films présentés dans le cadre de Ciné-cadeau.

mercredi 18 avril 2012

Lettre à la CLASSE

Lettre à la CLASSE

La situation est tendue tel un fil sur le point de casser.

Après plus de deux mois de manifestations historiques, de répression et, plus récemment, un processus de judiciarisation du conflit, la ministre Beauchamp semble reculer. La muraille entêtée du gouvernement Charest se fissure. Cette brèche est suffisante pour faire pénétrer la lumière dans le débat.

Mais voulant sans doute sauver la face du gouvernement, et ce qui reste de dignité au premier ministre Charest, celle qui commence probablement à paniquer sous la pression des multiples bavures policières et les échecs de la job de bras digne de l’époque de Duplessis, lance aujourd’hui un ultimatum : « condamner les violences et y renoncer afin de faire avancer les choses ». 

Je comprends que vous ne souhaitiez pas participer, voire vous abaisser, à cette logique paternaliste qui va à l’encontre des principes même de la démocratie directe. Je comprends très bien que vous ne souhaitiez pas adhérerà cette façon de penser selon laquelle un porte-parole, confondu avec un chef, devrait dénoncer des gestes isolés qui, dans certains cas, n’ont peut-être rien à voir avec le mouvement qu’il représente.

Je comprends qu’en refusant de vous prononcer à ce sujet vous refusez un amalgame qui a sans doute pour objectif de vous discréditer auprès de la population.

Mais le récent (et ignoble) débat auquel le porte-parole de la CLASSE a participé face au chroniqueur Christian Dufour, inutilement provocateur et sincèrement obtus à l’émission de Denis Lévesque sur les ondes de LCN,  démontre que même un professeur comme M. Dufour ne semble pas comprendre la culture de la démocratie directe.

Même lui, habitué à la chose politique, ne parvient pas, et je ne doute pas de sa sincérité, à comprendre votre refus d’adhérer à la politique spectacle et à la personnalisation des enjeux politiques.

Le culte de la personnalité ambiant jumelé à un hyperindividualisme devenu culturel les empêche, lui comme Martineau et de nombreuses personnes hostiles au mouvement étudiant, de comprendre une autre logique que celle qui est devenue la leur.

Voilà pourquoi je ne saurais trop vous suggérer de tenter une autre approche que celle de la confrontation des idées et d’obtenir auprès de vos adhérents le mandat de formuler une déclaration qui irait dans ce sens :

« Nous condamnons la violence utilisée par certains de nos membres, ainsi que la brutalité policière qui a été déployée depuis le début des manifestations. »

Cette déclaration qui aurait pour effet de permettre au gouvernement Charest de sauver la face auprès de la population, ce qui le rendrait plus disposé à négocier, pourrait du même souffle lui jeter à la figure sa propre responsabilité quant à l’escalade de la violence.

De plus, elle lierait les mains de la ministre Beauchamp qui ne pourrait plus se réfugier derrière un écran de fumée pour refuser de vous inviter à la table des négociations, tout en permettant à la CLASSE de faire preuve d’une certaine envergure.

Cette envergure que la population attend encore d’un homme d’État, c’est de vous qu’elle viendrait.

Chose qui, en plus d’être noble, s’avérerait positive pour le rayonnement de votre cause auprès de l’opinion publique.

Merci de votre attention,

Cordialement.

Claude André

mardi 17 avril 2012

Hollywood et la politique : se divertir sans s'abrutir


Hollywood en plywood

Certains ne s’en vantent pas dans les salons, mais la plupart des gens adorent savourer des films hollywoodiens. Dans son captivant essai Hollywood et la politique, paru chez Écosociété, Claude Vaillancourt nous invite à ne pas bouder notre plaisir tout en demeurant attentifs aux messages qui y sont véhiculés.

Votre livre est-il une charge contre le cinéma d’Hollywood?
Non, au contraire. L’objectif est de contribuer à ce que les gens comprennent mieux ce qu’ils voient car de nombreux messages sont transmis par le cinéma hollywoodien. Il s’agit d’un contexte assez particulier où les investissements sont très élevés et où nombre de personnes interviennent dans le processus de production. Dans ce contexte, est-ce que les réalisateurs peuvent vraiment transmettre des idées qui leur sont personnelles ou qui vont à l’encontre des intérêts de ceux qui financent ces films? Un contrôle est-il exercé et, si oui, dans quelle mesure?

Et la réponse est…
Il subsiste un contrôle qui est assez grand mais les gens peuvent y échapper car, malgré tout, on y retrouve une certaine liberté d’expression.

Vous dites qu’Hollywood souffre, en ce moment, d’un grave manque d’imagination. Quel serait l’âge d’or?
Je reproduisais un propos que l’on entend souvent, dont celui du célèbre critique Roger Ebert. Si on analyse les années 40-50, on se rend compte qu’il y a eu beaucoup de bons films à cette époque, dont ceux de Frank Capra. On y retrouvait une grande richesse dans les dialogues, qui s’est transformée avec le temps en scènes d’action. Chaque année, de bons films sont réalisés. Par exemple, en 2011, The Descendants avec George Clooney est un exemple assez intéressant de film qui pose de bonnes questions. L’idée de mon livre m’est venue pendant les années Bush durant lesquelles la presse était soumise aux dépêches et aux communiqués qu’émettait son gouvernement. Or, le cinéma américain a connu une excellente période à ce moment-là. Je pense à des films contestataires, comme Lord of War, Syriana ou Munich (Steven Spielberg).

Parlant de Spielberg, que pensez-vous du discours selon lequel le cinéma hollywoodien serait contrôlé par des Juifs qui s’en serviraient comme d’un instrument de propagande?
Je n’embarque pas là-dedans. Les studios appartiennent à des empires financiers qui sont plus grands qu’eux-mêmes et ces empires viennent de partout. Il y a Sony, qui appartient à des Japonais, l’Australien Murdoch est propriétaire d’un studio, il y a aussi General Electric qui en possède… C’est une sorte de grande sphère financière. Certains, comme Hervé Kempf, ont parlé d’une oligarchie mais j’ai ne crois pas à une oligarchie dominée par une ethnie particulière. Cela dit, aux yeux des républicains, Hollywood est un nid de démocrates et c’est pour cela qu’ils s’y attaquent souvent.


Claude Vaillancourt est romancier, essayiste, conférencier, musicien, professeur de littérature, militant altermondialiste et cinéphile. Membre du comité de coordination de la revue À bâbord, il a écrit Mainmise sur les services et les romans Les années de bataille et L’inconnue. Son dernier ouvrage, Hollywood et la politique, est actuellement en librairie.

«The Descendants avec George Clooney, un exemple assez intéressant de film qui pose de bonnes questions», selon l'auteur Claude Vaillancourt.

lundi 16 avril 2012

Le western urbain de Marie-Hélène Poitras

Western urbain

Fana des films de Sergio Leone et de polars, l’auteure et journaliste Marie Hélène Poitras nous livre un western-spaghetti nappé de 
« montréalités » avec son roman Griffintown. Une oeuvre qui sublime ces marginaux, souvent poqués, qui conduisent des calèches. À lire avec du Ennio Morricone en musique de fond.


Vous avez choisi d’écrire un western urbain…
Je laisse les gens décider si c’est vraiment un western ou non. Mais je le suggère d’autant plus que j’ai eu vraiment du plaisir à jouer avec les clichés qui s’y rattachent. Je ne parle pas des westerns traditionnels construits de façon manichéenne, mais bien des westerns-spaghettis avec leur côté série B, leur aspect lyrique et leurs trames musicales. Mon défi était de trouver une façon de faire passer ces effets sonores dans l’écriture. C’est d’ailleurs pour cela que j’emploie un style assez sensible et que la prise en charge de la narration frôle la forme poétique. Pour la conclusion du livre, j’avais la volonté de créer quelque chose qui pourrait rappeler la célèbre scène finale du film Le bon, la brute et le truand, lorsque le gars se sauve à cheval avec la musique qui embarque sur l’image.

Vous dites que les cochers sont des gens qui construisent leur légende. Pourrait-on dire que ce sont aussi des poqués qui se font du cinéma?
Oui, c’est cela. Ce sont tous des conteurs nés. C’est ainsi qu’ils gagnent leur vie. Plus leur tour de calèche est captivant, davantage ils touchent en pourboire. En les côtoyant, j’ai découvert que ces gens colorés ont souvent un passé assez rough qu’ils essaient d’oublier. Un cocher raconte toujours sa légende, celle qu’il a peaufinée. Or, lorsqu’il n’est pas présent, les autres cochers proposent une autre histoire sur ce même cocher. En passant pas mal de temps avec eux, on finit par connaître la vérité qui est toujours fascinante. Par exemple, lorsque nous attendions les touristes, il m’arrivait de les observer, de les écouter et j’avais l’impression d’être dans une pièce de théâtre où il n’y aurait jamais de temps morts.

Vous révélez que les cochers sont détestés des résidents du Vieux-Montréal.
Ce sont des gens assez fortunés qui achètent des condos de luxe. Pour eux, de voir un gars à l’allure un peu louche qui n’a pas bien nettoyé son emplacement en partant et en y laissant l’odeur du cheval, c’est dérangeant. Vous savez, le fouet dont sont munis les cochers n’est pas destiné aux chevaux. On me l’a dit assez tôt. Une fois, alors qu’un conducteur me mettait de la pression pour me dépasser dans une petite rue où cela n’était pas possible, j’ai arrêté mon cheval et je suis descendue de ma calèche avec mon fouet pour lui en administrer un coup retentissant sur le capot de sa voiture! Et je lui ai dit : « Si t’es pressé, ne passe pas par les petites rues du Vieux. » Je suis ensuite remontée sur ma calèche avant de repartir très lentement.

Marie Hélène, si je vous invitais à savourer un bon steak de cheval…
(Rires). Jamais de la vie. Je ne mange même pas de poisson ni de fruit de mer, alors encore moins du cheval!






Née en 1975, Marie Hélène Poitras est critique musicale à l’hebdomadaire Voir. Elle a publié Soudain le Minotaure, en 2002, qui lui a valu le prix Anne-Hébert, et La mort de Mignonne et autres histoires, en 2005, qui fut finaliste au Prix des libraires du Québec. Marie Hélène est également éditrice à la Zone d’écriture de Radio-Canada.

lundi 9 avril 2012

Le Grand Martineau

Caricature signée Yvon Roy dont on peut consulter le site en cliquant ici
Le pire c'est que c'est gars-là, Martineau, il est dans la «vraie vie» ultra sympathique.

Bestiaire


Un zoo la vie

Avec Bestiaire, son dernier long métrage dépourvu d’histoire et de dialogue, Denis Côté propose une œuvre de  formalisme pur qui, venant d’un autre cinéaste, passerait peut-être inaperçue mais qui s’inscrit à merveille dans la démarche qui est la sienne. Certains crieront au génie, d’autres au scandale. Une chose demeure certaine, le petit prince tatoué du cinéma d’avant-garde ne laissera, encore une fois, personne indifférent. Rencontre.

Sur l’affiche, on peut lire «Productions Métafilms». Comme dans supérieur ou au-delà. Est-ce que  
Bestiaire est un méta film ?
Contrairement à la plupart des gens dans le cinéma québécois qui disent que ça prend une bonne histoire, la narration n’est pas la chose qui m’intéresse le plus. Est-ce que je suis en réaction à quelque chose ? Peut-être. Je ne veux pas utiliser le mot provocation, cela m’a apporté des problèmes. Mes films ne cherchent pas à provoquer mais ils réagissent.  Les États nordiques réagissait à ma job de critique qui devait couvrir des films en pleine période de politique de performance. J’ai toujours une impulsion un peu juvénile qui consiste à réagir à mon film précédent, à ce qui se fait au Québec et dans le cinéma en général.

D’où est venue l’idée de Bestiaire ?
La direction du Parc safari, rencontrée pour la scène de lion dans Curling, m’a invité à revenir tourner à ma guise. Je me suis dit : «on y fera quoi ? » Je ne suis pas un amoureux des animaux, je ne fais pas des films de sujets, je n’ai pas d’agenda social particulier, je ne fais pas de films de causes et je n’essaie pas de vendre quelque chose.
Mais je suis obsédé par les éléments constitutifs du cinéma comme le montage et le son. Puisque je ne voulais pas faire un documentaire sur un zoo et que je n’avais pas d’argent pour une fiction, je me suis demandé : qu’est-ce qui reste ?

Et alors ?
Généralement, lorsque l’on tourne un animal c’est pour nous faire rigoler sur Youtube ou par anthropomorphisme. Mais un animal, ça ne s’ennuie pas et ça ne possède que 7 ou 8 secondes de mémoire. Ma question était de départ était donc : peut-on filmer un organisme vivant de façon à la fois esthétique et frontale ? Contrairement à ceux qui avancent que je ne fais des films que pour moi-même, la pire insulte, Bestiaire est le film absolu pour le public parce que les gens sont obligés d’y projeter leur propre personnalité et leur vie personnelle en le regardant.

Ce film ne brosse –t—il pas quand même un parallèle avec l’univers carcéral ?
L’avocat du zoo m’a posé la même question. J’ai répondu : «Monsieur, on a pas d’argent, nos sommes que trois munis d’une caméra vidéo et on filme vos enclos pendant l’hiver !». C’est un film qui vise l’objectivité la plus totale mais les gens veulent me prêter des intentions. J’avoue que le son, retravaillé, est assez dur mais il ne visait pas à choquer. Je pense que, puisque nous ne sommes pas particulièrement amoureux des animaux, c’est devenu extrêmement froid, neutre et clinique. Je ne peux pas te dire si tu as raison ou non quant à l’univers carcéral sauf que ce n’était pas mon impulsion.  Fin de l’intellectualisation car on pourrait le faire pendant des heures avec ce film faussement naïf. Mais quand tu me dis, « on voit ce que l’on veut bien y voir, tu me fais un très beau compliment.»

Bestiaire, de mon ancien collègue du Ici Denis Côté, est présentement en salles.





Bestiaire, le 6ième long-métrage de Denis Côté, a eu sa première mondiale au prestigieux festival Sundance, était le film d’ouverture de  la 30ième édition des Rendez-vous du cinéma québécois et comptait parmi la sélection de la 62ième Berlinale qui a eu lieu cette année.