samedi 13 janvier 2007

La peste dormait à Marseille

Mes espions me disent que ce petit blogue compte des lecteurs dans la superbe ville de Marseille qui m'a littéralement foudroyé d'amour, il y a quelques années. D'ailleurs, je compte bien y retourner un jour. Je vous salue bien bas en attendant et vous remercie de me lire. Manquerai pas d'aller fraterniser avec mon pote Bernard l'Anar, photographe officiel du port et personnage débonnaire qui possède une pléthore d'anecdotes dans sa besace genre les cargos partent bourrés d'armes la nuit vers l'Afrique du Nord.
Cela m'a rappelé qu'il y a 3 ans et demi, on craignait beaucoup le retour de la peste. J'avais profité de mon séjour là-bas pour écrire un papier destiné à La Presse à ce sujet.
Le voici.

La Presse

Actuel Santé, dimanche 10 août 2003, p. C2

La France craint le retour de la peste

André, Claude

Marseille - Déjà inquiétés par la grève aux effluves pestilentielles des éboueurs en juin, certains Marseillais ont eu des sueurs froides quand ils ont entendu la rumeur: la peste serait revenue.

À la suite à la recension par l'Organisation mondiale de la santé d'une quinzaine de cas de peste bubonique à la mi-juin à Oran (Algérie), dont au moins un mort, les autorités du port de Marseille ont resserré leurs contrôles sanitaires des bateaux en provenance d'Algérie.

"Comme nous avons énormément de transits avec l'Algérie, nous avons mis en place des mesures plus spécifiques, assure Girard Girouin, Ingénieur d'études sanitaires à la Direction départementale des Affaires sanitaires et sociales des Bouches-du-Rhône (DDASS). Là-bas, certains villages ont été mis en quarantaine par l'OMS et l'épidémie ne s'est pas propagée. Pour notre part, depuis le 8 juillet, nous avons entrepris des mesures de dératisation permanentes. C'est à dire que nous installons des appâts empoisonnés ainsi que des pièges à rats de façon à nous assurer qu'il n'y a pas de rongeurs en provenance d'Algérie. Nous plaçons également des morceaux de fer cylindriques qui empêchent les bestioles de monter par les amarres. Si nous en avons capturé jusqu'à maintenant? Non, aucun. Rassurez-vous. Nous mettons toutes les chances de notre côté. Comme nous l'avons démontré à la presse et à la télévision locale et nationale, nous maîtrisons parfaitement la situation."

Plusieurs de ses collègues de la rive nord de la Méditerranée auraient également mis en place des mesures similaires dont ceux des ports de Barcelone et de Palma en Espagne.

Bien que les bateaux modernes ne sont plus les repères à rats qu'ils étaient autrefois, notamment parce qu'ils sont en fer, que les matières premières sont conditionnées dans des conteneurs et que la nourriture de l'équipage est conservée de façon hermétique, des rats infectés peuvent toujours s'y faufiler; comme cela s'était produit lors de la grande peste de Marseille qui remonte à 1720.

Particulièrement dévastatrice, elle avait causé la mort d'environ 30 000 personnes au pays de Marcel Pagnol. Cela avait d'ailleurs inspiré l'écrivain provençal, pour quelques passages de son livre Le temps des amours. "Il faut absolument lire ce bouquin pour comprendre les affres de la peste à Marseille, lance le le bactériologiste Bernard La Scola de la Faculté de médecine de Marseille, avant d'entreprendre son exposé sur un ton professoral. Il s'agit d'une bactérie qui est très pathogène et qui, à l'état naturel affecte les rats sauvages. Il arrive parfois que le rat des champs entre en contact avec le rat des villes et lui transmette ses puces nocives. Ce dernier sera alors porteur de la maladie et c'est au contact de ce rat des villes, que l'homme va être contaminé. C'est pourquoi nous avons surtout eu peur au début des vacances en juin. Pendant la grève des éboueurs, la population de rats a considérablement augmentée, ça pullulait de bestioles."

La maladie demeure dangereuse pour l'être humain. En revanche, ce qui a changé depuis la peste du 18ème siècle, c'est que l'on peut facilement traiter la maladie. Cela dit, la peste demeure une maladie infectieuse préoccupante, précise le professeur. En effet, le problème qui se pose face à cette maladie c'est que non décelée, elle peut entraîner la mort en un laps de temps aussi court qu'une semaine. Ses symptômes principaux se manifestent par l'apparition de ganglions, de pustules dans le cou, à l'aine, à l'aisselle et de poussées de fièvre intenses.

On la croyait relégué à la paranoïa collective d'une époque révolue, voilà que la peste n'a pas encore dit son dernier mot. La situation évoque le célèbre roman d'Albert Camus La Peste. Ce qui n'est pas sans frapper l'imaginaire sous le ciel chantant et caniculaire de Marseille.

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