samedi 28 juillet 2007

Marie-Jo l'exlatée

C'est qui qui assistera au concert de sa copine ce soir ?

Entrevue parue dans le Ici lors de la parution de son dernier disque en terre d'Amérique.

Touchée par les fées qui se sont penchées sur son berceau, Mar-Jo Thério nous chamboule à nouveau avec la parution de l’album Les matins habitables. Un disque important qui se retrouvera au panthéon de la chanson.

Claude André

Elle arrive, irradiante, sur la terrasse du resto avec sa crinière peroxydée, sa chienne « la Chèvre » et son look néo-baba. « Tout le monde qui la rencontre en tombe amoureux » lit-on à l’intérieur du dossier de presse. Pour l’auteur de ces lignes, voilà déjà 5 ans. Peu après la parution de l’album lunaire et magnifique La Maline qui devait la consacrer sous le ciel de la francophonie. La discussion était décousue et difficile à suivre par moment. Je l’avais écrit. Elle s’en souvient. Cette fois, la femme avec laquelle je partage un kawa sur la pelouse face au fleuve (le resto n’acceptait pas les chiens) s’ouvre davantage.
Une question et hop, la voilà qui s’envole dans un soliloque au sujet de l’espace habité. Thème récurant chez l’Acadienne actuellement exilée en France depuis un an et demi. Le rire est franc. Le bonheur lui fait des guili-guili. Bientôt quadra, la femme est encore une gamine de 5 ans. Elle peut encore être trop timide pour aller s’acheter un sac de chips au coin de la rue et se disséquer l’âme une heure après sous les projecteurs d’une salle subjuguée…
Et si elle est demeurée naïve et spontanée sa garde remonte à quelques rares occasions. Malgré une place désormais acquise au sein du gotha, Marie-Jo Thério est toujours en proie à l’insécurité, au doute. « Cette légitimité m’a permis d’acquérir une grand liberté. C’est pas Hollywood, (rires) mais c’est beaucoup en rapport à mes besoins à moi. Même si je ne jamais cesser de douter cette reconnaissance m’a légitimé le droit de faire des erreurs et d’improviser. Elle m’a également permis de comprendre que j’avais des choses à célébrer sur le plan musical avec des musiciens comme Bernard Falaise ou Michel Côté. Je me suis retrouvé dans le sens du rythme qu’ils possèdent et leur façon si particulière de réagir à la seconde à quelque chose. Ce sont de véritables improvisateurs. Et avec eux, je me suis rendu compte que j’étais vraiment à la maison. Cela a été, et demeure encore, aussi simple que ça ».

Amoureuse hystérique?
Marie-Jo, qui avait elle même confectionné sa tenue du jour, est d’une certaine simplicité volontaire donc. Si elle semble aujourd’hui paisible lorsqu’elle raconte ses excusions dans les îles de la Rive-Sud avec sa barque à moteur, on s’imagine bien qu’il n’en fut pas toujours ainsi. Comédienne, elle incarne aussi le phantasme de l’amoureuse hystérique qui court la nuit pieds nus dans la neige qui plait à certains garçons dans les salles de rédaction. La bohémienne, voyageuse, mystérieuse, lunaire, n’a-t-elle pas choisi l’exil, encore une fois? « La sensation d’exil à 40 ans…faut en avoir envie. Quitter une carrière pour essayer d’en établir une autre…. Il y avait tout ça mais aussi un enracinement qui étais très réel. J’étais aussi une femme amoureuse là-bas. Et c’est probablement ma relation la plus sereine jusqu’à maintenant. Chose dont je n’ai pas l’habitude pour revenir à ton image des pieds nus dans la neige. On vieillit, le corps ne suit plus tout à fait dans la passion non plus », révèle-t-elle.

Avant de confier qu’elle envie des gars comme Dan Bigras qui ont pu aller loin dans les excès de dope, de relations amoureuses, d’alcool, bref dans l’abandon. Elle qui aurait aimé goûté à ces fruits défendus mais que sa nature trop frêle ne lui permettait pas. Enivrez-vous de vin, de poésie ou de vertu disait le poète. Marie-Jo aurait elle trouver sa salvatrice mélancolie dans la tristesse de l’exil comme d’autres pleurent des vers en vidant des verres? « Je ne la recherche pas. J’ai une affection pour elle comme pour le bonheur, la légèreté, l’humour, la fête. C’est certain que la couleur du piano, la pluie, dégage cette impression. Quand j’avais 20 et que je vivais des histoires tragiques genre tomber en amour avec un Russe qui était au bout du monde, le piano devenait toujours le rival. Je creusais ma tombe avec le piano. J’ai eu un rapport avec cet instrument qui était très lourd mais j’ai tenté de m’en détacher au fil du temps. »
L’absolu identitaire
S’il est une chose dont la chanteuse de Moncton ne pourra jamais se détacher, c’est assurément cette acadienneté qui l’habite comme une épiderme. C’est d’ailleurs sous les auspices de son pote le poète Gérald Leblanc qu’elle a réalisé Les matins habitables, du titre d’un de ses recueils de poésie. Un album conçu d’abord pour le marché français. Ce qui fait en sorte qu’on y retrouve des chansons que le public d’ici connaît déjà telles : Café Robinson, Arbre à fruits, arbres à fruits et Moncton revisitées histoire de les dépoussiérer et d’ajouter la saveur des cordes de Bernard Falaise

« Si les réorchestrations des vieilles chansons ont été fortement suggérés par les producteurs français? On vit dans l’absolu quant on peu et puis à un moment ou se rend compte que oups…Quand on a terminé l’enregistrement de La Maline, il y a cinq ans on s’est retrouvé avec un autre album dont on nous a dit : « c’est très bon mais qui va l’écouter. Où est le hit en quelque sorte. Il fallait donc un minimum de garanti. Comme je n’avais ni notoriété ni compagnie de disque. J’ai fait des concessions par survivance. Je m’étais dit je vais
« Cet album a été enregistré pour les Français. Je ne croyais pas le sortir ici. Puis, la chose terminé on a démontré l’intérêt de la sortir ici.»
Veinards que nous sommes.

1 commentaire:

La grenouille a dit…

Super beau portrait... Très, très talentueuse, cette Marie-Jo...

Et c'est à qui la belle p'tite bouille de la photo? Mmmm...Elle me rappelle drôlement quelqu'un...:-)

Bon dimanche,
La grenouille