mercredi 8 septembre 2010

Entrevue avec Marc Barbé: le père de Mozart




Récemment de passage à Montréal, le comédien Marc Barbé nous a parléde son incroyable parcours et du personnage qu’il interprète dans le film Nannerl, la sœur de Mozart, présenté au FFM.

Traits burinés, tout de noir vêtu, tatouage sur la main, à 49 ans le comédien Marc Barbé arbore la dégaine de ceux qui ont vécu. Comme si une vieille âme sommeillait en lui. Et c’est sans doute aussi pour cela qu’un jour, son ex beau-frère, Gérard Mordillat, lui a proposé de jouer dans En compagnie d’Antonin Artaud, auprès de Sami Frey.

L’ancien menuisier, qui a vécu dix ans aux États-Unis avant de devenir traducteur de romans à son retour en France, n’a évidemment pas refusé. Il avait 32 ans, aucun cours de théâtre derrière la cravate, mais beaucoup de poèmes, jamais publiés, à son actif. Ce qui convenait très bien au personnage. Et vogue la galère, le voici aujourd’hui à Montréal, accoudé au bar d’un hôtel pour nous parler de son dernier rôle, tout en nuances.

Car, et c’est la force du jeu de l’acteur, le spectateur ne sait jamais tout à fait si Léopold, le papa des deux petits génies que sont Mozart et Nannerl, est un monstre d’égoïsme qui utilise ses enfants à son profit ou un père bienveillant qui n’est pas sans connaître le rendez-vous de Mozart avec l’Histoire. Et si on ne parle pas de sa fille, qui était aussi ultra-douée, c’est que l’époque ne permettait pas d’envisager, ne serait-ce qu’un instant, qu’une femme joue du violon et encore moins compose de la musique.

Un père tyrannique?

«Oui, Mozart a eu des conflits très sévères avec son père. Ce dernier était-il tyrannique? Je l’ignore, mais il a quand instruit un petit garçon dans lequel il a reconnu des dons exceptionnels. Ce n’était pas que des fantasmes de parent, le père de Mozart était quand même un chef d’orchestre, un violoniste et un pédagogue qui avait aussi écrit une méthode de violon qui faisait autorité», explique Barbé, fasciné de découvrir combien les musiciens sont comparables à des athlètes, et les subtilités qui existent entre techniciens et artistes.

Comment a-t-il construit son personnage, et comment a-t-il appris la façon dont on doit manipuler un violon? «Je dis toujours aux réalisateurs: donnez-moi ce que vous voulez que j’ai. J’évite de faire un travail en parallèle. Dans ce cas, René (Féret, le réalisateur), m’a filé pas mal de lettres de Léopold Mozart et il m’a parlé de choses qui lui semblaient importantes: ces gens, les Mozart, n’étaient pas des bourgeois, mais plutôt des roturiers. Des provinciaux pas si à l’aise que ça à la cour des monarques», explique le comédien sur le ton d’une chaude humilité, qu’il semble conserver bien qu’il ait joué dans quelque 25 films.

Même si, aujourd’hui, il ne quitterait plus la France pour une longue période, comme il l’a fait jadis, il garde encore de beaux souvenirs de l’Amérique, et en particulier de la Louisiane où il a encore des amis. «Oui, les derniers événements m’ont touché. D’autant plus, qu’il y a eu une autre grande catastrophe dans les années 80 à La Nouvelle-Orléans, le sida. Il a été très dévastateur. Comme San Francisco, où il y a beaucoup d’homosexuels, c’est une petite ville où il y a une grande promiscuité. Dans les années 80, j’y ai perdu beaucoup d’amis. Ce raz de marée, puis maintenant le pétrole et la perte de toutes ces archives musicales qui étaient dans les caves… d’une tristesse.»

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